Les pieuvres sont impressionnantes par de nombreux aspects, notamment leur capacité à changer de couleur en fonction du danger en une fraction de seconde. Elles pourraient également «voir» la lumière avec leur peau autant qu'avec leurs yeux. Une étude que relève le Guardian montre que leurs yeux n'interviennent pas forcément dans leur stratégie de camouflage, qui pourrait être déclenchée par des capteurs de lumière présents sous la peau de ces céphalopodes, par ailleurs daltoniens.
Leurs tentacules contiennent des chromatophores, des cellules qui, en se contractant ou en se décontractant, provoquent le changement de couleur. Dans les années 1960, l'hypothèse suggérant que les chromatophores réagissaient à la lumière sans que celle-ci ne soit détectée par les yeux avait déjà été émise, mais jamais validée. Les biologistes évolutionnistes Desmond Ramirez et Todd Oakley, de l'Université de Californie, apportent des preuves de cette théorie, publiées le 20 mai dans The Journal of Experimental Biology.
Changement de lumière
Ils ont réalisé une expérience sur onze prélèvements de peau de pieuvres nouveaux-nés et adultes, qu’ils ont exposés à des faisceaux de diodes lumineuses de différentes longueurs d'onde. En présence de lumière blanche, la réaction des chromatophores est rapide. Face à de la lumière rouge en revanche, l'effet est moins fort. C'est en présence de lumière bleue que la réaction est la plus marquante.
Or la longueur d'onde de 480 nanomètres est celle que certaines opsines, des protéines sensibles à la lumière et présentes dans les yeux, absorbent le mieux. Ces résultats suggéraient donc la présence d'opsines dans la peau des pieuvres, comme c'est le cas chez d'autres espèces. Les chercheurs ont effectivement mis en évidence cette découverte par des tests de coloration.
Ils ne pensent cependant pas que les opsines en question reconstituent une image détaillée dans le cerveau des pieuvres mais qu'elles lui permettent plutôt de détecter les changements de lumière. Il se pourrait également que les opsines constituent un capteur physique qui réagirait aux ondes, comme cela a été récemment montré pour les antennes de drosophiles. Les deux scientifiques vont prolonger leurs recherches pour comprendre comment interagissent, chez différentes espèces, les opsines oculaires et celles présentes dans l'épiderme.