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Sepp Blatter doit quitter la Fifa. Et Michel Platini ne doit pas le remplacer

Temps de lecture : 3 min

Michel Platini lors d'une réunion du comité exécutif de l'UEFA à Bordeaux le 26 septembre 2008, REUTERS/Olivier Pon
Michel Platini lors d'une réunion du comité exécutif de l'UEFA à Bordeaux le 26 septembre 2008, REUTERS/Olivier Pon

«La France entraînée dans le scandale de la Coupe du monde au Qatar», peut-on lire ce mardi 3 juin à la une du quotidien britannique The Daily Telegraph. La révélation du journal ne concerne pas vraiment tout le pays, mais plutôt un homme: Michel Platini, président de l'UEFA et l'un des hommes les plus puissants du football mondial.

Selon le Daily Telegraph, Platini a rencontré au cours d'un rendez-vous privé le sulfureux qatari Mohamed Bin Hammam, lui-même ancien membre éminent de la Fifa dont il a été suspendu à vie pour corruption. Bin Hammam est accusé d'avoir versé des millions d'euros à différents dirigeants du football mondial pour s'assurer de leur soutien à la candidature de son pays. Le rendez-vous avec Michel Platini aurait eu lieu peu avant le fameux vote du 2 décembre 2010 à Zurich, au cours duquel le comité exécutif de la Fifa a attribué l'organisation du Mondial 2022 au Qatar.

Un «scoop» qui n'en est pas un

Le rendez-vous ne prouve en rien que Michel Platini a été influencé par Mohamed Bin Hammam pour soutenir la candidature du Qatar, et encore moins qu'il a reçu de l'argent de sa part. Platini vient d'ailleur de démentir avoir été influencé.

Bin Hammam était à l'époque en campagne pour la présidence de la Fifa, et a sans doute rencontré dans ce cadre un grand nombre de dirigeants du football mondial. Les deux hommes étaient également membres du comité exécutif de la Fifa à l'époque, raison de plus pour qu'un rendez-vous ne soit pas suspect.

Comme l'ont souligné certains médias français, le timing de cette fuite n'est pas innocent: le patron de l'UEFA étudie la possibilité de se porter candidat à la présidence de la Fifa contre Sepp Blatter, en poste depuis 1998 et qui va se présenter à sa propre succession. Sepp Blatter, habile personnage politique qui a su consolider sa place à la tête de la plus puissante fédération sportive du monde en écartant tous ses adversaires potentiels et a déjà réussi à se faire réélire trois fois, n'est peut-être pas pour rien dans la fuite.

Les soupçons existaient déjà

Mais le «scoop» n'apporte en fait pas grand chose de nouveau ou d'accablant sur Michel Platini. Pas plus que le fameux rendez-vous à l'Elysée quelques semaines avant le vote avec Nicolas Sarkozy, l'émir du Qatar et le Premier ministre de l'émirat, même s'il constitue au minimum une tentative ouverte de lobbying. Le patron de l'UEFA a aussi le droit d'avoir voté pour le Qatar, bien que là encore la décision est étrange: le rapport technique indiquait qu'il y faisait trop chaud et que le Qatar était la seule candidature «à haut risques».

Platini s'est en revanche mis tout seul dans une situation de conflit d'intérêt potentiel quand son fils Laurent est devenu peu après le patron de Burrda Sport, équipementier sportif appartenant à un fonds d'investissement qatari. Pour comparaison, en France, les ministres doivent depuis l'affaire Woerth/Bettencourt remplir des déclarations d’intérêts où figurent notamment les intérêts de leur premier cercle familial. Le poste de Laurent Platini rentrerait clairement dans une telle catégorie.

Pris individuellement, tous ces épisodes ne prouvent aucun méfait. Mis ensemble, ils créent une situation où il est raisonnable d'avoir des souçons, et où Platini ne peut plus être considéré comme celui qui fera sortir la Fifa du climat d'opacité et de corruption dans lequel elle baigne depuis sa création.

Platini n'est pas le bon successeur de Blatter

Depuis le vote de 2010, l'organisation qui gère le football mondial a fait quelques progrès en matière de transparence en créant notamment une commission d'éthique, un organe supposément indépendant censé enquêter sur les dossiers de corruption au sein de l'organisation. Mais elle reste «une petite mafia» (selon les mots d'un de ses anciens dirigeants, Guido Tognoni), dirigée depuis plus de quinze ans par le même homme, qui devrait selon toute vraisemblance se faire réélire pour la quatrième fois. Comme avant lui Joao Havelange, président de 1974 à 1998 et impliqué dans des affaires de corruption.

Pour changer, la Fifa a besoin non seulement de se débarrasser de son président Sepp Blatter, mais d'un successeur ayant comme objectifs principaux de la réformer en profondeur, de promouvoir la transparence et de modifier les modalités d'attribution de la Coupe du monde comme a essayé de le faire le CIO après le scandale de Salt Lake City.

Michel Platini a été un grand joueur, il a les idées claires sur ce que devrait être le football aujourd'hui et a mis en route des réformes importantes à l'UEFA comme le fair play financier. Mais sa position délicate dans le dossier qatari et l'absence dans son parcours de dirigeant d'un engagement sans faille en faveur de la transparence n'en font pas le candidat dont la Fifa a besoin pour mener à bien ces changements urgents et indispensables.

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