Chaque samedi, Louison chronique un objet ou un événement de notre quotidien.
«À Noël dernier, je t'ai donné mon cœur et dès le lendemain tu l'as revendu sur Vinted.» Voilà ce qu'aurait pu chanter George Michael si la grande faucheuse, visiblement amatrice de pop qui colle aux oreilles, ne nous l'avait pas chouré il y a quelques Noëls de ça. Mariah Carey qui, elle, pète toujours le feu et les coutures de son costume de mère Noël circa 1999, pourrait même ajouter: «Y a pas grand-chose qui me ferait plus plaisir à Noël que de t'avoir sous le sapin.» Visiblement, Mariah ne connaît pas mes ex, dont personne ne voudrait, même sur Vinted, même pour deux balles, FDP compris. «FDP», ça veut dire frais de port. Aussi.
Bref, revoici Noël et son kilomètre par minute de tickets-cadeau-sans-le-prix-en-cas-d'échange imprimés. Noël et ses casse-tête incessants pour savoir si on a déjà offert à notre cousin au troisième degré ce kit à verrines, celui trouvé près des caisses à la Fnac, quand le malaise vagal pointait et quand l'envie de passer le réveillon en position fœtale sous l'escalator qui emmène au rayon des DVD se faisait tonitruante. (La réponse est oui au fait, vous lui avez déjà offert le kit à verrines.) (Onze fois en quinze ans.) (Et lui, douze.)
Bref, la magie de Noël est bien là, avec son cortège d'épines d'épicéa plantées dans le boule, ou collées à celles du sapin. Et n'allez pas me dire que les sapins c'est pas écolo et qu'il vaut mieux en prendre un artificiel. Si j'avais envie que ça sente le plastique chez moi, j'aurais épousé une influenceuse made in Dubaï. Et je préfère les sapins des Vosges, ils ont une conversation bien plus stimulante et ils n'essaient jamais de me revendre un fer à lisser qui éloigne les ondes du cancer des pointes fourchues.
Bref, magie de Noël je disais donc, sauf bien sûr pour les canards dont les organes internes vont finir tartinés sur des mini toasts pleins de gluten, ou pour tous les gens qui avaient prévu de prendre le train avec une ou douze correspondances, pour aller manger en famille lesdits canapés, tout en se faisant engueuler sur le choix de la consommation de «joie gras», ou de «faux gras», concept marketing à base de tofu qui vient souiller un mot, un savoir-faire, une profession, et une technique millénaire de torture, par les boomers de la famille qui, à la troisième coupette, vont vociférer que le vrai foie gras est une vraie source de joie, sauf peut-être pour les oies.
À LIRE AUSSI
Le foie gras éthique, ça n'existe pas
Mon cadeau de Noël, c'est de vous offrir des phrases extrêmement longues, comme la précédente par exemple. Ainsi, plus besoin de vous échauffer avant de lire l'intégrale de Proust qu'un membre de votre famille, capricorne ascendant sadique, va vous offrir. Et bon courage pour y trouver un ticket d'échange, le salopiaud l'aura sûrement perdu, comme le temps.
Voilà, maintenant que j'ai tartiné de la magie de Noël avec autant de zèle que celui avec lequel les forces de l'ordre couvrent des vitrines de librairies au passage d'un ministre à qui il faudrait offrir l'intégrale de Mona Chollet à Noël plutôt que le very best of du préfet Lallement, il me reste à vous souhaiter de passer un très bon réveillon, une bonne digestion, puis un très bon repas de Noël, et une autre très bonne digestion. Ce ne sera pas un jour férié pour votre intestin grêle je pense.
Si je ne doute pas que malgré la morosité ambiante, nous réussirons à trouver en nous autant de bonne humeur puérile qu'un gardien de but argentin, je suis sincère quand je vous dis ceci: continuez de croire au Père Noël.
La preuve, Marlène Schiappa est toujours ministre.
Feliz Navidad!
Et vivement lundi.