Chaque samedi, Louison chronique un objet ou un événement de notre quotidien.
Giscard c'était l'accordéon, Mitterrand les labradors, Chirac les pommes, Sarkozy les montres très chères, Hollande le scooter, et Macron: les casseroles.
Giscard c'était aussi Vulcania, Mitterrand la pyramide du Louvre, Chirac le musée des arts premiers, Sarkozy Disneyland, Hollande la pluie, et Macron: les «dispositifs sonores portatifs».
Giscard aura été le président de la loi Veil, Mitterrand celui qui a aboli la peine de mort, Chirac, celui qui a reconnu la responsabilité de l'État français dans la rafle du Vel d'Hiv, Sarkozy celui qui a relancé la carrière de Carla Bruni, Hollande le président qui a promulgué le mariage pour tous, et Macron celui qui a fait interdire les ustensiles de cuisine dans les manifestations.
Fait-tout, cocotte, casserole, à manche amovible ou fixe, empilable ou non, compatible ou pas avec une plaque à induction, made in France ou made in très loin, passant ou non au lave-vaisselle, peu importe du moment que, frappée à coups de cuillère en bois et autres spatules, elle fasse du bruit au passage de celles et ceux qui nous gouvernent, pour qu'ils n'aient plus d'autres choix que d'entendre celles et ceux qui, depuis des mois, crient à l'injustice des réformes.
La démocratie va mal quand elle est obligée de sortir des woks pour se faire entendre. Et je ne parle pas de celles et ceux qui chagrinent les boomers en proposant de faire, pour une fois, jouer le rôle de Cléopâtre par une femme noire, rapport au fait que si ça se trouve, bah c'était bien une femme noire et que juste dans le doute, pour une fois, bah on pourrait tenter cette représentation là sans que la Terre se décale l'orbite. Et me lancez pas sur les sirènes.
Bref, je parle bien des récipients en fonte, en inox ou même en tôle –ça rappelle des scores socialistes–, dans lesquels on peut faire cuire tout un tas de choses et même des légumes oubliés. Et je ne parle pas des «sages» du Conseil constitutionnel.
Tout ça pour dire qu'au bout de presque soixante-cinq années de Ve République, nous avons désormais un président qui n'a pas peur de faire des allocutions pour ne rien dire, pas la frousse non plus de chanter n'importe quoi avec n'importe qui, pas davantage les chochottes à l'idée d'aller dire à peu près n'importe quelle connerie à fort potentiel diplomatique et problématique dans à peu près tous les coins du globe, en revanche, nous avons un président qui, soudain, a peur du bruit des casseroles comme s'il était un paquet de coquillettes prêt à y être jeté. Paquet de coquillettes dont le prix, n'en déplaise à l'actuelle Première ministre, continue chaque jour à augmenter dans les rayons des supermarchés.
Un président qui n'aime donc pas les gros bruits, mais n'a visiblement rien contre les grosses ficelles habituelles de la politique qui colle aux semelles de chaussures, et envoie depuis quelques jours les ténors de son gouvernement (oxymore de l'année) nous dire que ce qui embête vraiment les Français, ce sont les fraudes sociales faites à la CAF par ces salauds d'étrangers qui viennent jusque dans nos bras égorger nos fils et nos RSA.
Non, en fait on s'en fout de cette goutte d'eau détournée dans le tsunami de pognon des puissants qui survivra à tout, même aux glaciers. Ça tombe bien, si j'en crois l'ONU, des glaciers, bientôt, y en aura plus. En attendant, il reste les casseroles.
Vivement lundi.