Pourquoi envions-nous l'orgasme des cochons? Les gauchers sont-ils davantage intelligents? Quand il pleut, est-ce que les insectes meurent ou résistent? Vous vous êtes sans doute déjà posé ce genre de questions sans queue ni tête au détour d'une balade, sous la douche ou au cours d'une nuit sans sommeil. Chaque semaine, L'Explication répond à vos interrogations, des plus existentielles aux plus farfelues. Une question? Écrivez à [email protected]
On observe depuis toujours les comportements et les relations des animaux entre eux. Ne serait-ce qu'à la maison, entre deux chats, ou entre deux chiens –voire entre un chat et un chien. Mais leur relation affective, parfois pleine de tendresse, est-elle pour autant un signe d'amour?
La question divise les scientifiques. Des chats, des koalas ou même des girafes peuvent-ils tomber éperdument amoureux? Un amour fort, presque indescriptible, qui prend aux tripes. Un amour à l'image de celui qui peut exister entre les êtres humains. La réponse est plus compliquée qu'un simple oui ou non.
Affection, fidélité, compassion
Il y a une chose dont les scientifiques sont sûrs: les animaux ne sont pas dénués de sentiments. Il n'y a qu'à regarder les images déchirantes des éléphants pleurant la mort de leurs congénères pour en être persuadé. On sait également que les animaux s'accouplent et forment des liens affectifs forts. Pour autant, déterminer s'ils ressentent des émotions amoureuses intangibles est beaucoup plus difficile, explique Discover Magazine.
Les scientifiques ont montré qu'au sein du règne animal, on pouvait observer des attachements émotionnels puissants, comme l'amitié ou même la compassion, un comportement relatif à l'amour. Ce sentiment a notamment été observé chez les chimpanzés, qui aident les membres malades de leur groupe, et chez les dauphins. Tout porte ainsi à croire qu'ils ont également la capacité d'aimer.
Ils ont beau rester liés presque toute leur vie, les pingouins ont tout de même parfois quelques sexfriends à côté.
Il y a aussi des exemples qui ressemblent fortement à ce que nous, êtres humains, considérons comme un amour romantique. Prenez les albatros: après avoir survolé toute l'année les océans, ils retrouvent une fois par an le même partenaire, qu'ils gardent parfois pendant plus de soixante ans. Romantique!
Question fidélité, ce ne sont pas les seuls: les girafes, les flamants roses, les escargots, les gibbons, les manchots et les pingouins sont également connus pour rester liés presque toute leur vie. Un attachement qui semble aller bien au-delà de la simple affection, ajoute le média scientifique. Bon, cela n'empêche tout de même pas les pingouins d'avoir parfois quelques sexfriends à côté. Juste pour le plaisir.
Hormones de l'amour
Pour autant, voir l'amour à travers le prisme de la sexualité, de la fidélité ou de la reproduction serait trop réducteur. D'autant plus que certains animaux ne se mettent pas ensemble dans le but unique de procréer, comme en témoignent les nombreuses relations homosexuelles –étudiées scientifiquement sur 500 espèces. Les animaux peuvent aussi créer un attachement et un dévouement à long terme envers un partenaire de voyage, ou simplement avec un individu de leur groupe. Là encore, on observe des preuves d'affections fortes, proches de ce que l'on considère comme de l'amour.
Les neuroscientifiques, quant à eux, ont utilisé un autre angle d'attaque: ils ont cherché à déterminer si les animaux avaient des signes chimiques d'amour, comme une production accrue de certaines hormones. La recherche s'est intéressée à l'ocytocine, surnommée «l'hormone de l'amour» ou de «l'attachement», qui s'active chez deux amoureux réunis, mais aussi lors de fortes relations affectives. Résultat, de nombreux animaux, comme les chiens, les chats, les chèvres, et même certains rongeurs, possèdent cette puissante hormone de manière semblable aux êtres humains.
Pour les neurosciences, pas de doute: de nombreuses espèces possèdent les attributs physiologiques nécessaires pour leur permettre d'éprouver des sentiments amoureux. Si tant est que ce dernier soit défini comme «un sentiment de forte affection pour un individu particulier». Et c'est justement sur cette définition, celle de l'amour, que les scientifiques restent prudents en ce qui concerne le règne animal.
Peut-on parler d'amour?
Si l'on en revient à la racine même de l'interrogation qui nous turlupine aujourd'hui, on peut déjà avoir un élément de réponse. Ici, la question est en fait de savoir si les animaux sont capables d'aimer exactement comme nous le faisons nous, les êtres humains. C'est cet anthropomorphisme qui contrarie les scientifiques, et empêche toute forme de réponse binaire ou facile.
Boris Cyrulnik, médecin, neuropsychiatre et psychanalyste français, a parfaitement résumé la situation en une phrase: «Les animaux vivent dans un monde d'émotions, de représentations sensorielles et sont capables d'affection et de souffrance, mais ce ne sont pas pour autant des êtres humains», a-t-il expliqué.
Il n'y a en effet aucun doute sur le fait que l'on trouve des preuves d'empathie, d'affection et même de chagrin chez les animaux même. Et si amour il y a, il est tout simplement bien différent de celui des humains. Ce n'est pas pour autant une amourette de seconde zone! Comme chaque être humain a sa façon d'aimer, l'amour dans le royaume animal semble prendre diverses formes, avec divers degrés d'intensité et de durée. Les animaux semblent aimer à leur manière, et on est encore loin de percer tous les mystères de leur vie sentimentale.
En même temps, qui s'est déjà heurté à la vie sait que l'amour n'est pas un sentiment simple. Chez l'humain, son analyse et sa compréhension sont déjà une épreuve des plus complexes, il ne fallait pas s'attendre à moins chez les animaux.