Santé / Société

Confinement, jour 5

Temps de lecture : 3 min

Nous préparant à un confinement long, nous avons adopté les gestes salvateurs du survivalisme et monté notre propre factory DIY.

Jour 5 du confinement: opération de ravitaillement | Flickr US Army
Jour 5 du confinement: opération de ravitaillement | Flickr US Army

Au jour 5, l’angoisse du confinement est désormais palpable. Les enfants grignotent leurs céréales et leur forfait 4G avec parcimonie. Les traits tirés trahissent les nuits sans sommeil. Privés d’un exercice réparateur, nos muscles se flétrissent à vue d’œil. Les stocks de papier toilette se rétrécissent dramatiquement malgré mes consignes de fermeté (un pipi OU un caca par jour). Les réserves d'oxygène sont encore considérables mais pour combien de temps?

Hier, j’ai surpris mon fils qui enterrait un paquet de lentilles corail dans le jardin.

– Mais... Mais que fais-tu? Pourquoi dérobes-tu ces vivres à la collectivité?

– Ouiiin, pardon père... C’est que je crains... ouiiin... qu'on soit dans l'incapacité de nous sustenter à notre aise dans quelques jours... ouiiin... Et tu sais... je voulais vous préparer un dahl surprise... un jour... snif...

Au jour 5, nous sommes en mode survie

Calmant son chagrin dans la chaleur rassurante de mon thorax paternel, je cessai aussitôt de me voiler la face: nous sommes désormais en mode survie. D’ici peu, avec le confinement total, nous ne pourrons sans doute plus compter sur l’extérieur.

Or, nous ne sommes pas –et j’en assume la pleine responsabilité– mais alors pas du tout prêts à vivre en autarcie. Hormis des réserves de Gevrey Chambertin pour environ cinq ans, le reste de nos provisions ne nous permettra guère de tenir plus de trois jours. Tandis que les larmes de mon fils coulaient en flots ininterrompus, je résolus d'agir, et d'agir vite. Le soir venu, je réunis les enfants en mode workshop.

– Les enfants, il est probable que nous serons confinés ici plus longtemps que prévu et... (ma gorge se noua) Et sans le moindre contact avec l’extérieur. Nous n'irons plus faire les courses, bientôt il n'y aura plus aucune sortie possible.

– Même au Starbucks ?

– Même au Starbucks.

– Putain, c'est si grave que ça alors?

– Hélas, je le crains. Mais acceptons dignement cette épreuve et préparons-nous au pire. Comme nos grands parents du néolithique, je crois que nous devrons fabriquer nous-mêmes les outils indispensables à notre survie. Alors, je vous le demande: de quoi aurons-nous absolument besoin dans les prochaines semaines?

– De la 4G!

– Des Pom’potes!

– Un podcast sur les masculinités toxiques!

– La saison 4 de Stranger Things!

Comment Jules Verne nous inspira

J’en ai eu assez vite marre du dialogue participatif et je leur ai imposé la lecture de L’Île mystérieuse, mon livre de référence en matière de survivalisme. Un groupe de cinq Américains échoue sur une île déserte. L'un d'entre eux est un ingénieur, Cyrus Smith. Ce type est une Révolution industrielle à lui tout seul. En balade, pendant que, toi, tu ramasses trois cailloux pour jeter au chien; lui les met précieusement dans sa poche. Dans sa tête, il est déjà en train de construire des hauts fourneaux et d'écrire un plan quinquennal.

«Le repas terminé, au moment où chacun allait se livrer au sommeil, Cyrus Smith tira de sa poche de petits échantillons de minéraux d’espèces différentes et se borna à dire: “Mes amis, ceci est du minerai de fer, ceci une pyrite, ceci de l’argile, ceci de la chaux, ceci du charbon. Voilà ce que nous donne la nature, et voilà sa part dans le travail commun! —À demain la nôtre!”»

Faut-il affûter des couteaux? Il suffit de trouver une «roche arénacée» et, une fois évidés, des phoques font de parfaits «soufflets de forge». Cyrus produit sans souci de la nitroglycérine, des bougies, du pain, du verre, et fournit du pyroxyle à qui en demande en mettant néanmoins en garde car il souffre d'une «excessive inflammabilité.» Rien ne lui résiste. En cette période de confinement, Cyrus Smith te fabriquerait du gel hydroalcoolique à partir de n'importe quel jus de pomme.

Une fois le roman lu, nous avons examiné nos ressources. Nous avions à notre disposition de l’herbe, des feuilles de tulipes, un rouleau de sopalin terminé, un peu de fil de fer, des branches, du coton et un truc sec. C’était assez pour subvenir à nos besoins essentiels des premiers jours.

Par solidarité, nous avons souhaité partager le fruit de nos travaux pour que vous aussi puissiez créer chez vous en quelques minutes à peine ces objets qui, demain peut-être, vous sauveront la vie.

Attention: n'essayez pas de planter vos brosses à dents en pleine terre pour obtenir des arbres à brosses à dents!

Tous nos produits sont qualité Made in France ©.

Photo non contractuelle. Etui livré sans smartphone.

Bien entendu, si vous n'avez pas l'âme bricoleuse, vous pouvez aussi acquérir ces objets à la boutique en ligne de Slate.

Chez nous, ces premiers succès en appellent d'autres. Dès demain, nous construisons une antenne relais de téléphonie mobile 100% végétale.

Confinement, mode d'emploi
Confinement, jour 4

Épisode 4

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Confinement, jour 6

Épisode 6

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