C'est ce que laissent entendre plusieurs articles parus dans la presse internationale ces dernières semaines, comme le rapporte le quotidien berlinois Der Tagesspiegel. C'est d'abord le magazine Rolling Stone qui a sonné l'hallali en février dans un reportage consacré à un lieu incontournable de Berlin: le Berghain. Ce club berlinois mythique, élu «meilleur club du monde» par la bible techno britannique DJ Mag en 2009, est aujourd'hui presque plus fréquenté par les touristes que par les Berlinois eux-mêmes, constate amèrement Rolling Stone. Le magazine rock déplore que la hype autour du Berghain et des autres clubs de la capitale allemande ait fini par détruire l'équilibre fragile de la coolness berlinoise:
«La hausse des visiteurs venant de Londres, de New York et de San Francisco ne se traduit pas seulement par des essaims de non-germanophones alcoolisés dans les parcs de Berlin mais par l'avancée d'un capitalisme de masse globalisé à l'intérieur de la bulle anarcho-bohème de Berlin. Cela signifie des prix en hausse pour les habitants et par conséquent l'obligation de travailler plus et en fin de compte moins d'opportunité de faire la fête trois jours durant.»
Le blog américain Gawker s'est immédiatement rangé derrière son avis, titrant laconiquement: «Berlin est finie. Quelle est la prochaine?». Selon le blog, le fait que Berlin soit désormais un sujet de discussion qui polarise, restant pour les uns la ville la plus géniale du monde et étant pour les autres déjà passée de mode, «marque la fin de [son] long règne […] en tant que ville la plus cool du monde».
The New York Times, quant à lui, compare Berlin à Brooklyn. Selon le quotidien américain, la capitale allemande ne serait qu'une annexe de ce quartier ultra-gentrifié, prisée des fêtards new-yorkais frustrés pour sa bière bon marché, ses clubbers sympa et la sécurité de ses rues.
«Une métropole qui veut s'affirmer économiquement peut-elle garder sur la durée le charme de l'inachevé et de l'anarchique?», s'interroge Der Tagesspiegel, rappelant que ces dernières années, «beaucoup de clubs des quartiers résidentiels de Mitte et de Pankow ont dû fermer [NDLR : Icon, Club Picknick, ZMF, Rechenzentrum...] parce que les habitants des lofts voisins […], qui avaient leur phase clubbing loin derrière eux, se plaignaient à cause du volume de la musique et des clients saouls».
Ville la plus cool du monde ou pas, Berlin continue pourtant d'attirer chaque week-end des foules de clubbers du monde entier, à croire que l'info n'est pas arrivée jusqu'aux oreilles des amateurs de techno et de friches urbaines. L'an dernier, la capitale a battu un record de fréquentation: plus de 11 millions de touristes s'y sont pressés l'an dernier.