Monde

Le problème avec les drones: les pilotes n'y voient pas grand-chose

Temps de lecture : 2 min

Une manifestation contre l’utilisation des drones World Can't Wait / Via Flickr CC Licence by

Heather Linebaugh était analyste pour l’armée de l’air américaine de 2009 à 2012. Dans un témoignage publié sur le site du Guardian, cette spécialiste des drones prend à contre-pied l’enthousiasme des politiques pour ces avions sans pilotes. En rappelant que les hommes aux commandes de ces drones ne voient pas si bien:

«Nous nous demandons toujours si nous avons tué la bonne personne, si nous avons mis en danger la mauvaise, si nous avons pris la vie d’un civil innocent à cause d’une mauvaise image ou d’un mauvais angle.»

Le témoignage de Heather Linebaugh peut être lu comme une réponse à la tribune de Philipp Hammond. Le ministre de la Défense britannique avait publié un texte, le 18 décembre, dans le Guardian. Selon lui, «les insurgés savent […] que ces systèmes contribuent largement à les identifier, et à identifier leurs armes».

Heather Linebaugh rappelle également le stress causé par ce pilotage à distance. Et, plus encore, par la «culpabilité» à l'idée de tuer quelqu’un, sans jamais être certain qu’il s’agisse d’un ennemi. Le témoignage de cette militaire américaine rappelle celui de Brandon Bryant, un ex-membre de l’US Air Force, qui souffre d’un syndrome de stress post-traumatique après avoir passé cinq ans comme pilote de drones. «Quand Bryan appuyait sur un bouton au Nouveau-Mexique, quelqu’un mourait à l’autre bout du monde», racontait le Spiegel. Confiné dans son container climatisé, le pilote de drones Predator était coupé de la réalité de la guerre:

«Je n’ai jamais pensé que je pourrais tuer autant de personnes. En fait, je pensais que je ne pouvais même pas tuer quelqu’un.»

Slate.fr avait relaté l'histoire de Brandon Bryant en décembre 2012. Le pilote, devenu insomniaque et incapable d'avoir une vie sociale, avait fini par s'effondrer dans son cockpit en crachant du sang. Après six mois de pause, il n'avait pas renouvelé son contrat avec l'armée.

Une étude de février 2013, relayée par le New York Times, montrait que les pilotes de drones avaient un fort taux d'incidence pour douze conditions médicales, dont l'anxiété, la dépression, le syndrome de stress post-traumatique, la toxicomanie et les idées suicidaires. Jean Lin Otto, l'une des co-auteurs de l'étude, rappelait que les pilotes d'avions classiques «n'étaient pas témoin des massacres, parce qu'ils partaient le plus vite possible» contrairement aux pilotes de drones.

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