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Des milliers d'Américains en prison à vie pour des délits sans violence

Temps de lecture : 2 min

REUTERS/ Lou Dematteis, prison de Saint-Quentin, Californie
REUTERS/ Lou Dematteis, prison de Saint-Quentin, Californie

Il y a neuf ans, Ronald Washington a volé deux teeshirts estampillés Michael Jordan dans un magasin de Shreveport en Louisiane. Les teeshirts étaient en solde et vendus chacun à 45 dollars. Mais leur prix officiel était de 60 dollars, une différence qui a une conséquence inimaginable sur le destin de Ronald Washington. A moins de 100 dollars, un vol en Louisiane est considéré comme un délit mineur passible d’une peine de prison de moins de six mois, au-delà il s’agit d’un crime dont la peine maximum est la prison à vie. C’est la sentence qui a été infligée à Ronald Washington… sans la moindre possibilité de remise de peine.

Le site d’informations Reason.com dénonce les errements de la justice américaine à partir d’un rapport intitulé «A living death» (Une mort vivante) que vient de rendre public l’American Civil Liberties Union (ACLU), une association qui défend les libertés aux Etats-Unis. Elle dénonce le sort de milliers de délinquants condamnés par une justice américaine devenue folle à des peines de prison à vie sans la moindre possibilité de remise de peine pour avoir commis des délits et des crimes parfois dérisoires et surtout sans le moindre acte de violence .

Au moins 3 278 prisonniers étaient dans ce cas dans les geôles américaines à la fin de l’année 2012. Ils illustrent des décennies de politiques toujours plus dures contre la criminalité «qui n’ont qu’un lointain rapport avec la justice et ne font preuve d’aucune sagesse et d’aucune compassion» écrit Reason.com. Et encore ces chiffres sont incomplets car trois Etats américains, le Delaware, le Nevada et la Virginie, ne fournissent aucune statistique sur ses cas.

Selon une estimation de l’ACLU, 65% de ses prisonniers «qui ne rentreront jamais chez eux pour revoir leurs parents ou leurs enfants» sont noirs et un grand nombre d’entre eux étaient affectés par des maladies mentales ou sous l’emprise de drogues quand ils ont commis des délits. Le contribuable américain paye des millions de dollars pour les laisser mourir à petit feu.

Le magazine Time s’insurge aussi contre cette situation. Il souligne que «le nombre de prisonniers américains condamnés à la perpétuité sans possibilité de remise de peine a quadruplé entre 1992 et 2012» et que «plus de 18% des délinquant condamnés à une telle peine pour un délit non violent en sont à leur première condamnation». Dans la majorité des cas, il s’agit d’affaires de drogues.

La récidive est aussi souvent à l’origine de ces condamnations parce qu’elle permet une escalade des peines encourues. Ainsi, Ronald Washington, le voleur de teeshirts a été considéré «comme un criminel récidiviste» et passible de peines extrêmement lourdes conçues pour mettre hors de la société des délinquants considérés comme «perdus». Le problème avec Ronald Washington et de nombreux autres c’est qu’aucun des précédents délits dont il était l’auteur – vol, faux et usage de faux, possession de cocaïne – n’était passible de la perpétuité. «Au nom de quoi l’addition de ses délits justifie la perpétuité ?» s’interroge Reason.com.

Il y a de nombreux autres exemples tout aussi révoltants. A 28 ans, James R. Byers a été condamné à la perpétuité pour avoir vendu une dose de crack pour 10 dollars au nom d’une loi en Caroline du sud dite des «three strikes» contre la récidive.

Kevin Ott avait lui 33 ans quand il a été condamné à la prison à vie en Oklahoma pour être en possession de quelques centaines de grammes d’amphétamines tandis qu’il était en liberté sur parole pour une condamnation relative au trafic de marijuana. while on parole for marijuana charges.

Teresa Griffin avait 26 ans et aucun passé criminel quand elle a été envoyé en prison à vie pour avoir servi de «mule» à son ami dans une opération de trafic de cocaïne. Même cas de figure et même sentence pour Alice Marie Johnson à l’âge de 42 ans.

L’ACLU conclut son rapport en soulignant que «les Etats-Unis sont virtuellement seuls à condamner des délinquants non violents à mourir derrière les barreaux». L’association ajoute «nous devons commencer par reconnaître que tuer quelqu’un est pire que de lui vendre de la drogue».

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