Monde

Dzhokhar Tsarnaev: les photos du policier sont plus théâtrales que celle de Rolling Stone

Temps de lecture : 2 min

Dzhokhar Tsarnaev sortant du bateau où il s'était réfugié, photo de Sean Murphy publiée par le Boston Magazine
Dzhokhar Tsarnaev sortant du bateau où il s'était réfugié, photo de Sean Murphy publiée par le Boston Magazine

Comme beaucoup d'Américains, le sergent Sean Murphy a été choqué et excédé par le magazine Rolling Stone, qui a choisi pour illustrer une passionnante enquête sur le suspect des attentats de Boston Dzhokhar Tsarnaev un portrait «de rêve» du jeune homme. Mais contrairement à beaucoup d'Américains, Sean Murphy est un photographe de la police d'Etat du Massachusetts, et il a couvert les opérations des forces de l'ordre pour retrouver Dzhokhar Tsarnaev après sa fuite.

Il a décidé de publier dans le Boston Magazine plusieurs images prises lors de cette traque et de la capture du jeune homme. Images jamais diffusées auparavant. En sang, sale, bref, dans un état loin du beau gosse dylanien représenté en couverture de Rolling Stone. Il voulait ainsi «que le monde sache que le Tsarnaev qu'il a pris en photo cette nuit là –vaincu et à peine vivant, avec les points rouges des fusils des snipers sur son front– est le vrai visage du terrorisme, et non pas le jeune homme beau et confiant montré en une du magazine», explique le Boston Magazine.

Sean Murphy ajoute:

«Ce qu'a fait Rolling Stone est mal. Ce type est mauvais. C'est le vrai poseur de bombes de Boston. Pas quelqu'un d'arrangé et d'apprêté pour la une de Rolling Stone.»

Murphy a été suspendu par ses supérieurs pour avoir communiqué ces photos et parlé à la presse. Pas sûr non plus que Murphy ait atteint son but avec ses images. Car celles où Dzhokhar Tsarnaev sont encore plus impressionnantes et symboliques, voire christiques, que la couverture du magazine:

Voir toutes les photos sur le site du Boston Magazine

Comme le dit le journaliste Tom Scocca:

«Comment osent-ils publier une photo de beau gosse prise par Dzhokhar lui-même? Tenez! Voilà le vrai terroriste, mince et sanglant dans un clair-obscur théâtral!»

On peut comprendre les sentiments de Sean Murphy sans les partager. Et estimer que le jeune homme beau gosse, «arrangé et apprêté pour la une de Rolling Stone» est mauvais, qu'il est le vrai poseur de Boston. Et que c'est justement parce qu'il semble si inoffensif et mignon qu'il est important de le représenter ainsi dans les médias.

Comme l'expliquait sur Slate Mark Joseph Stern:

La une présente un contraste saisissant avec notre perception habituelle des terroristes. Ça nous demande:

«Qu'est-ce que je m'attendais à voir en Tsarnaev? Qu'est-ce que j'espérais voir?»

La réponse la plus probable est un monstre, un abruti grossier avec une apparence diabolique. Ce que l'on obtient à la place, c'est la plus alarmante des visions: un garçon qui ressemble à quelqu'un que l'on pourrait connaître.

[...] On peut souhaiter que les médias nous confirment que les psyhopathes sont des reclus fous, timbrés et flippants que l'on peut facilement identifier et donc éviter. Mais, comme cette histoire nous le rappelle, ce n'est tout simplement pas le cas. Certains psychopathes pointent une arme sur un objectif, d'autres se prennent en photo en T-shirt. Comme les nombreux amis de Tsarnaev pourraient en témoigner, on n'est pas aussi bons qu'on le croit pour repérer le mal qui se cache en dessous de la surface.

C.D.

Newsletters

Comment les femmes DJ ukrainiennes se sont hissées au sommet de la scène mondiale

Comment les femmes DJ ukrainiennes se sont hissées au sommet de la scène mondiale

Malgré la guerre, elles font toujours danser la planète.

Le combat des mères ukrainiennes pour retrouver leurs enfants déportés par la Russie

Le combat des mères ukrainiennes pour retrouver leurs enfants déportés par la Russie

Cinq livres précieux pour ne jamais laisser s'évanouir la mémoire de la Shoah

Cinq livres précieux pour ne jamais laisser s'évanouir la mémoire de la Shoah

«Un album d'Auschwitz», «Le Pacte antisémite», «La Mort en échec», «Une vie heureuse» et «Après la déportation» sont autant de témoignages et de travaux d'historiens puissants rappelant l'horreur du génocide juif et les marques qu'il a laissées.

Podcasts Grands Formats Séries
Slate Studio