Quand Google tombe en panne, c’est 40% du trafic Internet qui tombe avec. Vous l’avez lu en français ici et là, en anglais ici ou encore là. Google=40% du trafic Internet. Une équation impressionnante… et totalement fausse, comme l’explique ZDNet.
Tout commence dans la nuit du 16 au 17 août, à 1h37 heure française, lorsque Google connaît une panne sévère de deux minutes. Durant ce court laps de temps, le moteur de recherche et tous les services qui lui sont associés (Gmail, Google Drive, Google Plus, etc.) sont totalement indisponibles. Ce n’est qu’à 1h48 que les choses reviennent complètement à la normale. Cette panne n’est pas la première, mais il est rare que l’ensemble des services de Google soient atteints simultanément.
Le lendemain, GoSquared, un bureau d’étude londonien spécialisé dans la mesure de performance de sites web, publie une annonce selon laquelle cette panne a provoqué une chute de 40% du trafic global. Sauf qu’en réalité, il s’agit seulement du trafic web —on exclut donc le trafic email, celui des réseaux peer-to-peer et celui des applications pour ordinateurs ou terminaux mobiles. Et le trafic web étudié par GoSquared est celui des sites clients de GoSquared, c’est à dire un petit échantillon du web, principalement anglo-saxon, et pas le trafic web global.
Pourtant, le titre de l’article de GoSquared, véritable aubaine pour des médias désœuvrés en ce long week-end d’août, a été maintes fois repris dans la presse. Dans le meilleur des cas, on a parlé de «web global», dans le pire des cas d’«Internet global» ou d’Internet tout court. En aucun cas on n’a spécifié que cela ne concernait qu’un simple échantillon du web anglo-saxon. Même le très sérieux Forbes est tombé dans le piège, et a titré un séduisant: «Chiffre fascinant: Google, c’est maintenant 40% d’Internet».
Face à une telle effervescence, le blog américain Sandvine a cherché à savoir quel avait été le réel impact de la panne de Google sur le trafic Internet d'Amérique du Nord. Étant donné que d'après un précédent rapport, Youtube est le seul service de Google à intégrer le top 10 d'utilisation de bande passante, avec plus de 15% du trafic en période de pointe, la diminution du trafic induite par la panne de vendredi est estimée par le site à environ 15 à 20% du trafic. Deux fois moins que ce qu'affirmait GoSquared, et avec la précision que l'estimation n'était valable que pour l'Amérique du Nord.
Néanmoins, souligne ZDNet, bien que les 40% du trafic suggérés par GoSquared ne correspondent pas à la réalité, il n’en reste pas moins vrai que l’essentiel de l’activité Internet est concentrée sur quelques grosses plateformes. «Cette concentration, s’interroge Pierre Col, intrinsèque à un système d’économie de marché où des acteurs majeurs peuvent devenir dominants en rachetant de petits concurrents émergents, est-elle compatible à long terme avec une grande diversité des contenus et opinions permettant aux citoyens internautes de se forger leur propre avis sans être trop influencés?»