Nous vous avons déjà parlé des effets trop concluants du Librido, un booster de libido féminin... Ce qui avait quelque peu (re)lancé le débat sur le désir féminin. Une chose est sûre, le sujet est épineux, voire compliqué. On dit souvent que le cerveau des femmes joue un rôle très important dans le plaisir sexuel. Sauf qu'on taquine aussi souvent les femmes pour la complexité de leur cerveau. En somme, nous supposons beaucoup de choses sur le désir sexuel féminin, à tel point que même elles, n'y comprennent plus grand-chose.
Le livre What Do Women Want?: Adventures in the Science of Female Desire de Daniel Bergner sorti en juin 2013 aux Etats-Unis permet de refaire le point.
Commençons par la fin de l’article d’Ann Friedman sur le site The Cut. La journaliste a été stupéfaite par le livre du spécialiste en désir féminin:
«Faire l’amour par plaisir: les femelles coccinelles le font, les femelles abeilles le font, et je suis sûre […] que les femelles mouches éduquées le font aussi. Plus vite nous admettons que le plaisir est l’une des motivations principales pour désirer faire l’amour –pour les hommes comme pour les femmes– plus vite nous en seront les instigatrices.»
C’est en résumé la thèse que développe Daniel Bergner dans son ouvrage. D'après plusieurs études, il est prouvé que les femelles animales aussi sont demandeuses d’orgasmes. Alors pourquoi pas les humaines? En fait, elles le sont, comme l’écrit Ann Friedman d'une seule phrase:
«Les femmes aiment faire l’amour. Ce qu’elles n’aiment pas, c’est qu’on les punisse socialement pour ça.»
Nos amies les rates
Pendant l’amour, la rate va se retirer pile au moment où son rat de partenaire commence à être chatouillé par les prémices de l’orgasme. Non par sadisme, mais parce qu’elle aime quand ça dure. C’est comme ça qu’elle y trouve le plus de plaisir. Encore plus surprenant, lorsque des étudiants du laboratoire caressaient le clitoris des rates (dans un intérêt purement scientifique) et qu’ils arrêtaient, les rongeuses tiraient sur les manches des étudiants et réclamaient la suite.
«Ça, écrit Daniel Bergner dans son livre, recommençait encore et encore.» Et la journaliste note avec humour que l’étude ne dit pas si la situation changeait lorsque la femelle rat avait eu une dure semaine au boulot.
Les femelles animales ne ressentent pas simplement du plaisir à faire l’amour, elles ne sont pas effarouchées à l’idée d’être demandeuses... A l’inverse parfois des bipèdes femmes. Le livre de Daniel Bergner réexamine justement tout ce que nous pensons savoir sur le désir féminin et la biologie.
Effarouchées d’en demander plus
Dans l’article du New York Times Magazine dont nous vous parlions dans l’article sur le Librido, il était question de la libido des femmes. On y apprenait, contrairement à ce qu'on peut croire, que les femmes ne sont pas excitées par la stabilité et l’intimité émotionnelle dans un couple, qui plus est monogame, et qui dure. Bien au contraire. Un chercheur allemand écrivait:
«Pour les femmes qui sont avec leur partenaire depuis 1 à 4 ans, on constate une chute du désir qui s’installe et progresse. Laissant le désir de l’homme bien plus élevé, et du coup, insatiable.»
Pour Daniel Bergner, nous avons pris le désir féminin à l’envers. Il explique notamment pour le cas des rates:
«Les scientifiques se sont fixés sur ce que faisait la rate pendant l’acte sexuel, mais pas ce qu’elle faisait pour en arriver là.»
Si jamais vous avez déjà été célibataire, mesdames, vous avez sans doute une idée du travail qu’il faut abattre pour «en arriver là». Et c’est d’ailleurs à ce moment que les ennuis commencent. Daniel Bergner est persuadé que les femmes sont socialement –et non biologiquement– découragées d’initier un rapport, et d’y prendre ouvertement du plaisir.
Pour le spécialiste, les hommes et les femmes ont été bombardés avec l’idée que les femmes ne sont pas coquines par nature. Elles sont supposées ne vouloir que le compagnon qui va rester auprès d'elles, là où les hommes eux, cherchent à tout prix à faire l’amour, juste parce que c’est bon.
Être une chaudasse ne mène nulle part
C’est très simple: les femmes souhaitent faire l’amour. Et elles veulent faire l’amour avec un partenaire qui les désire. Problème, les hommes ont tendance à être révulsés par les femmes trop agressives sexuellement. Donc pour une femme, poursuivre ardemment ce qu’elle désire l’entraîne souvent à... Ne pas l’obtenir. Elle est peut-être là, la frustration de la femme moderne.
Qui a décrété cette stupide convention sociale? En fait, nous sommes tous relativement d’accord avec elle. Des recherches sur la séduction actuelle aboutissent à cette conclusion:
«Les deux sexes sont d’accord sur le principe que c’est à l’homme de courtiser la femme, et que la femme doit se comporter en destinataire passif de ses avances.»
C’est du moins ce qu’atteste Jessica Carbino, docteur en sociologie à l’université UCLA. Et elle en remet une couche:
«Les femmes et les hommes déclarent de manière écrasante que l’homme est supposé organiser le rendez-vous, inviter la femme, et venir la chercher. De plus, les femmes qui s’opposent à ce système de pensée sont perçues très négativement. Par exemple pour les hommes, les femmes qui initient des rendez-vous sont volubiles et ne sont pas intéressées par une relation stables.»
La séduction fadasse
Les femmes ne sont en réalité pas les seules à devoir batailler entre leur instinct primaire et les règles imposées par la société, comme le développe Ann Friedman. Elle cite Chiara Atik, auteure de Modern Dating: A Field Guide:
«De plus en plus d’hommes trouvent cela difficile d’être aussi direct, s’agissant de séduction et de sexe, que l’étaient leurs ancêtres des générations précédentes.»
Nous sommes tous d’accord sur le fait que les anciennes règles de courtoisie sont dépassées. Sauf que nous ne les avons pas encore remplacées par de nouveau standards. Ce qui pousse Chiara Atik à décrire notre séduction comme «fadasse» :
«Les femmes veulent du sexe, mais elles ne veulent pas être considérées comme allumeuses (ou pire, désespérées). Les hommes veulent du sexe, mais sont intimidés, incertains, ou ne veulent pas être perçus comme dominants. Nous ne sommes plus très sûr de qui devrait initier les choses, et du coup, plus personne ne prend les choses en main.»
En voilà une idée sexy: réinventons les codes de la séduction. Voire, foutons tous les codes à la poubelle, et laissons parler le rat qui sommeille en chacun.