Un nouveau médicament est sur le point d’être mis en vente aux Etats-Unis: l’Osphena de son nom américain, soit le viagra pour femmes, spécifiquement conçu pour les femmes qui ont atteint la ménopause et censé soigner celles qui ont mal pendant l’amour – une condition physique que l’on appelle la dysparénie.
D'autres médicaments sont également dépeints comme du viagra féminin, comme la Tefina, par exemple, mais l'Osphena a été approuvé par la Food and Drug Administration américaine début avril. La compagnie pharmaceutique Shionogi, qui commercialise ce médicament, affirme qu’au moins la moitié des 64 millions d’Américaines ménopausées en ont besoin pour retrouver leur libido.
Mais, alors que les pharmacies amassent des stocks de cette pilule salvatrice, certain(e)s remettent en question la nécessité d’un tel remède. Sur Newsweek, Jennifer Block explique ainsi que le «dysfonctionnement sexuel» lié à la ménopause n’est qu’un coup de marketing destiné à emplir les poches des laboratoires pharmaceutiques.
Block revient sur l’histoire de la ménopause, et s’intéresse notamment au moment où l’«âge climatérique» a été décrit comme une maladie.
«La ménopause est autant une maladie que l’adolescence, écrit-elle, et elle n’était pas considérée comme un problème avant les années 1960, quand les pharmaciens Wyeth-Ayerst, Upjohn et Searle en ont, de fait, changé l’image en la présentant comme un désordre lié au manque d’estrogènes- un terme qu’ils employaient pour être polis.»
De là, la ménopause est devenue une «tragédie», la «déchéance» annoncée de la femme. Conséquence naturelle: en 2001, le marché d’estrogènes représentait 2 milliards de dollars. A ce moment-là, plusieurs experts annonçaient que 43% des femmes ménopausées avaient besoin d’hormones pour aller mieux (une estimation dont la crédibilité est douteuse, puisqu’elle n’a été établie que sur un échantillon de 1.500 personnes).
Puis la Women’s Health Initiative de l’Institut national de la santé américain a annoncé que les estrogènes augmentaient les risques d’arrêt cardiaque, de cancer du sein et d’accident cardio-vasculaire. Les ventes se sont alors écroulées.
Aujourd’hui donc, c’est l’Osphena qui serait capable de débarrasser les femmes des problèmes de dysparénie. Selon l’obstétricienne-gynécologue et bioéthicienne Lorena Wissner-Greene, bien que certaines femmes soient en effet touchées par cette maladie, le laboratoire qui s’apprête à commercialiser le viagra pour femmes fait de la propagande avec le dysfonctionnement sexuel féminin et diffuse de fausses informations.
Par exemple, d’après Wissner-Greene, seules 10% des femmes qui ont eu la ménopause ont réellement besoin d’un traitement.
Jezebel relève en outre un détail peu encourageant: les femmes testées avant l’approbation du médicament par la FDA se sont avérées 14 fois plus enclines à avoir des infections urinaires.
L’Osphéna répond sans doute aux besoins de certaines femmes, mais demeure donc un médicament à consommer avec modération.
D.D.