En mai 2011, deux journalistes du Sunday Times accusaient, sur la base de témoignages de membres haut-placés de la Fifa, le Qatar d’avoir acheté les votes de certains membres en vue de l’attribution surprise de l’organisation de la Coupe du monde 2022 au petit Etat. Des accusations de corruption qui avaient entraîné la suspension de deux dirigeants mais n’avaient rencontré que peu d’échos dans les médias français.
Ce mardi 29 janvier, presque deux ans après ces évènements et alors que les médias britanniques ont depuis fait de nouvelles révélations, c’est au tour de la France, au travers d’une enquête du magazine France Football (FF), de découvrir les soupçons qui planent sur le vote du 2 décembre 2010, au cours duquel le comité exécutif de la Fifa a attribué la prestigieuse compétition au Qatar à 14 voix contre 8 pour les Etats-Unis.
Une attribution qui «ne correspondait ni à une logique sportive, ni à une logique historique, ni à une logique géographique» selon FF, mais qui «correspondait trop bien, en revanche, à une logique économique», et à laquelle la France aurait activement participé.
Corruption à la Fifa, intense lobbying et grosses sommes versées pour s’assurer les services d’ambassadeurs de luxe comme Zinedine Zidane ou Pep Guardiola, défauts majeurs de la candidature qatarienne comme la chaleur ou la petite taille du pays... La plupart des informations contenues dans l’enquête de France Football autour de ce qu’il appelle le «Qatargate» étaient déjà connues.
L'une des seules nouveautés concerne deux personnalités françaises de premier plan: l’ancien président de la République Nicolas Sarkozy et le président de l’UEFA Michel Platini. Le premier aurait organisé le 23 novembre 2010 une réunion secrète à l’Elysée avec le second, le prince du Qatar Tamin bin Hamad al-Thani, qui a tissé des liens politiques et économiques très étroits avec la France au cours des dernières années, et Sébastien Bazin, alors un des actionnaires principaux du Paris Saint-Germain en discussions pour revendre le club au Qatar. Un déjeuner au cours duquel Nicolas Sarkozy aurait demandé à Michel Platini de ne pas voter pour les Etats-Unis «comme il l’avait envisagé», mais pour le Qatar.
En échange de ce geste, le magazine suggère que les groupes français de BTP présents au Qatar bénéficieront des juteuses retombées des énormes chantiers de construction de stades qui attendent le pays. L’ancien meneur de jeu de l’équipe de France n’a pas tardé à répondre aux accusations aux travers d’un communiqué, comme le rapporte 20Minutes:
«Je l’ai déjà répété, le président Sarkozy ne se serait jamais permis de me demander de voter pour Qatar 2022 car il sait que je suis un homme libre. J’ai donc fait mon choix en toute indépendance, en suivant une logique simple qui est celle que je prône depuis toujours: l’ouverture à des pays qui n’ont encore jamais organisé de grands événements sportifs.
Croire que mon choix se serait porté sur Qatar 2022 en échange d’arrangements entre l’Etat français et le Qatar n’est donc que pure spéculation et n’engage que ceux qui écrivent ces mensonges. Je ne m’interdis pas d’attaquer en justice toute personne qui mettra en doute mon intégrité dans ce vote.»