«Après Merkozy, pas de Merkollande», titre le Zeit sur un ton péremptoire. Selon l'hebdomadaire allemand, les divergences de point de vue qu'ont affiché les deux chefs d'Etat lors du sommet européen qui s'est tenu cette fin de semaine à Bruxelles –Hollande annonçant que l'accord sur l'union bancaire serait effectif au 1er janvier 2013 tandis que Merkel soutenait le contraire, arguant que cela prendrait plus de temps–, sont la preuve supplémentaire que le couple franco-allemand est bel et bien en crise.
Avec l'arrivée au pouvoir de François Hollande, les relations bilatérales ont pris un tout autre tour ces derniers mois:
«Avec le président socialiste, la chancelière allemande a à ses côtés un allié totalement différent de celui qu'était son prédécesseur Nicolas Sarkozy. A la fin de son mandat, il était la plupart du temps proche de Merkel. Hollande, au contraire, aime provoquer le voisin –certainement aussi pour des raisons de politique intérieure. […] Un président français a rarement été d'humeur si agressive. Et Merkel a rarement laissé voir aussi clairement à quel point elle trouve cela superflu.»
Comme le note le quotidien berlinois Tagesspiegel, leur absence de position commune lors du sommet était à prévoir, eu égard au climat houleux dans lequel se sont déroulées leurs dernières entrevues:
«Ils n'ont pas travaillé main dans la main, mais se sont acharnés l'un sur l'autre et asticotés ouvertement.»
Mais au lieu de s'inquiéter de cette mésentente entre Merkel et Hollande, l'Europe devrait plutôt se réjouir, estime le Zeit :
«Cette nouvelle atmosphère refroidie entre l'Allemagne et la France n'est pas mauvaise. Au contraire: peut-être que l'Europe a gagné quelque chose cette fin de semaine. Ce qui de prime abord a l'air contradictoire deviendra clair si l'on pense à l'époque révolue de Merkel-Sarkozy. Parce qu'à ce moment-là, l'Europe était de facto un club exclusif des deux Etats les plus puissants et les plus importants sur le plan économique. On ne pouvait rien faire sans ces deux-là ni contre leur volonté. […] Tant que l'Europe reste capable de négocier […], l'Europe a gagné quelque chose d'important: plus de transparence et de diversité.»
Un avis que partage l'eurodéputé Daniel Cohn-Bendit, interviewé sur le Zeit:
«Je trouve ça pas mal du tout. La France cherche des partenaires comme l'Italie et l'Espagne pour casser le point de vue unidimensionnel du gouvernement allemand. C'est justement la réalité politique de l'UE aujourd'hui. Parce qu'un pays ne peut désormais plus, avec un autre, tout dominer. […] Autrefois Merkel et Sarkozy se rencontraient et prenaient les décisions à l'avance. […] Aujourd'hui les décisions sont plus sincères, car une grande majorité se trouve vraiment derrière elles.»