Quand il a fait les gros titres des journaux allemands en 1998, Muhlis A., alias «Mehmet», a écopé du surnom de «pire enfant d'Allemagne». Délinquant multirécidiviste, cet ado de 14 ans né à Munich mais de nationalité turque est devenu célèbre pour avoir été le premier mineur expulsé d'Allemagne –sans ses parents. Son cas avait alors suscité un grand débat sur la délinquance juvénile et sur les conditions d'expulsion. Parmi les 62 délits qui étaient reprochés à la petite frappe munichoise: vols, cambriolages, forçages de voitures, bagarres brutales...
Et voilà que 14 ans après les faits, «Mehmet», qui exploite un terrain de paintball à Istanbul, veut rentrer en Allemagne, révèle le quotidien bavarois Süddeutsche Zeitung, à qui le jeune homme de 28 ans explique:
«J'ai maintenant le recul pour réfléchir, et je regrette ce que j'ai fait. Je veux rentrer à Munich maintenant.»
La justice allemande lui avait pourtant donné une seconde chance en 2002, en lui permettant de rentrer en Allemagne. Mais trois ans plus tard, «Mehmet» avait à nouveau eu des ennuis avec la justice, après avoir frappé et menacé de mort ses parents, et avait été condamné à 18 mois de prison. Peine qu'il n'a jamais purgée puisqu'il a préféré prendre la fuite en Turquie... Son avocat turc espère aujourd'hui faire lever le mandat d'arrêt émis par la justice allemande, toujours valide, d'ici fin 2012. Il compte notamment s'appuyer sur l'accord qu'ont signé en 2005 l'Allemagne et la Turquie, et qui rend les conditions d'expulsion de citoyens allemands de nationalité turque beaucoup plus strictes.
Sans surprise, le ministre de l'Intérieur de la Bavière, Joachim Herrmann (CSU, branche bavaroise du parti majoritaire CDU), s'oppose fermement au retour de «Mehmet», considérant que celui-ci reste un «délinquant en série dangereux», comme le rapporte l'hebdomadaire Stern, citant le ministre:
«Pourquoi devrions-nous maintenant croire qu'il a changé? Si il vient en Allemagne, il devra purger la peine à laquelle il a été justement condamné.»
Dans une interview donnée au quotidien de boulevard Bildzeitung, qui est allé le rencontrer à Istanbul, «Mehmet» explique vouloir écrire un livre sur son expérience et venir en aide aux jeunes délinquants allemands, même s'il confie ne pas être «le bon Samaritain qui veut sauver le monde»:
«Je ne suis pas un travailleur social, je n'ai ni étudié ni appris ça. Mais j'ai mon expérience, je peux la partager avec des jeunes. Si les offices de la Jeunesse et d'autres institutions acceptent mon soutien, je le ferais avec grand plaisir...»