C’est l’une des questions les plus polémiques du débat politique allemand: faut-il interdire le Parti national-démocrate (NPD), le parti d’extrême-droite du pays? Selon un sondage paru fin 2011, trois Allemands sur quatre étaient favorables à une telle interdiction. Mais si le parti néonazi n’a jamais réussi à envoyer des députés au Bundestag depuis sa création en 1964, il fait bel et bien partie du paysage politique du pays et une procédure d’interdiction a été rejetée en 2003 par la Cour constitutionnelle allemande de Karlsruhe.
Ce lundi 3 septembre, le Spiegel rapporte que les autorités allemandes ont rassemblé un dossier de plus de 1.000 pages pour tenter de démontrer que le NPD représente un danger réel pour la démocratie, une condition nécessaire pour que la Cour européenne des droits de l’Homme valide une interdiction. Le journal s’est procuré le document, qui montre les dérives antisémites et racistes du parti et sa glorification des nazis, et qui «pourrait bientôt être à la base d'une décision pour tenter une nouvelle fois d’interdire» le parti.
Malgré les efforts du NPD pour prendre ses distances avec la NSU, une cellule néonazie tenue responsable de l'assassinat de neuf immigrants turcs et grecs en Allemagne entre 2000 et 2006, le document pointe la nature violente du discours des cadres du parti et rassemble plusieurs exemples de menaces proférées par ceux-ci. Il montre aussi les affinités du parti avec l’héritage d’Adolf Hitler, compilant les déclarations négationnistes et antisémites de certains membres, ce qui pourrait finir de convaincre les juges de Strasbourg du bien-fondé d’une interdiction.
La classe politique allemande reste néanmoins divisée sur la question, et rien ne dit qu’une nouvelle procédure sera lancée. Un nouvel échec donnerait en effet encore plus de légitimité au NPD. L’initiative est pour le moment portée par les ministres de l’Intérieur et les gouverneurs des différents Länder, qui essayent maintenant d’obtenir un soutien au niveau fédéral. La chancelière Angela Merkel ne s’est, «comme à son habitude» selon le Spiegel, pas encore clairement prononcée sur le sujet.