Culture

Les tubes deviennent plus longs, plus lents et plus tristes depuis cinquante ans

Temps de lecture : 2 min

La pochette du single «Someone Like You» d'Adele.
La pochette du single «Someone Like You» d'Adele.

En musique, le succès est de plus en plus mélancolique: selon une étude récemment publiée dans la revue Psychology of Aesthetics, Creativity and the Arts (accès payant), les tubes sont progressivement devenus, au cours du dernier demi-siècle, plus long, plus lents et plus tristes.

«Au fur et à mesure que les paroles de la musique pop devenaient plus autocentrées et négatives, la musique elle-même s’est mise à sonner de plus en plus tristement, et plus ambiguë émotionnellement», notent le psychologue E. Glenn Schellenberg et le sociologue Christian von Scheve dans leur étude, dont les résultats sont notamment relayés par le magazine Pacific Standard.

En analysant plus de 1.000 tubes du Top 40 américain entre 1965 et 2009, les chercheurs se sont rendus compte qu’un pourcentage croissant d’entre eux étaient écrit dans le mode mineur, «que la plupart des auditeurs […] associent avec la tristesse et le désespoir». Le nombre de tubes écrit en mode majeur est passé de 85% dans la seconde moitié des années 60 à 43,5% à la fin des années 2000. Le tempo des chansons s’est également ralenti jusqu’aux années 90, y compris dans celles écrites en mode majeur, celles qui sont théoriquement les plus joyeuses.

Pacific Standard explique par ailleurs que les chercheurs ont noté que cette tendance était parallèle à celle de l’accroissement du nombre d’artistes féminins au sommet des charts (même si celui-ci est ambigu, comme nous le notions l'an dernier). Un exemple typique est Adele, dont le Someone Like You —numéro un des charts américains pendant cinq semaines à l'automne dernier— a été vu par des psychologues et des neuroscientifiques comme une bonne application de «la formule pour une chanson larmoyante»: début calme, montée d’intensité, brusque changement d’octave au moment du refrain.

Sur son blog Legally Sociable, Brian Miller, professeur de sociologie à Wheaton College (Illinois), pose une série de questions intéressantes sur les conclusions de cette étude:

«J’aimerais savoir comment ils relient ces changements à des courants de la société plus puissants: ont-ils à voir avec une plus grande tristesse au sein de la société, ou peut-être avec la capacité ou la propension à exprimer des émotions négatives? Je me demande aussi si les données sont biaisées par le fait de seulement regarder les chansons du top 40 —l’ensemble de la musique reflète-t-il cette tendance ou est-ce seulement le cas des chansons les plus populaires?»

Ou à l’inverse, est-ce que ce sont ces chansons qui rendent la société plus triste? Bref, comme le résume le site Absolute Punk en citant un extrait du roman de Nick Hornby Haute fidélité, «Quel fut la cause et quel fut l’effet? La musique, ou le malheur?» Ce à quoi le personnage du livre ajoutait:

«Est-ce que je me suis mis à écouter de la musique parce que j'étais malheureux? Ou étais-je malheureux parce que j'écoutais de la musique? Tous ces disques, ça ne peut pas rendre neurasthénique?»

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