Le régime de Bachar al-Assad risque de devenir de plus en plus violent. C'est l'analyse de l'hebdomadaire The Economist qui estime qu'après presque un an de soulèvement, le conflit pourrait bien gagner encore en intensité.
Deraa, une ville proche de la frontière jordanienne, a été parmi les premières à entrer en résistance contre le régime syrien avec Homs plus au Nord. «Plus de mille morts», voilà ce que lui a coûté sa ténacité face aux forces armées de Bachar al-Assad, raconte l’auteur, qui décrit «le calme apparent» régnant dans les quartiers quadrillés par les chars et les soldats. Les syriens ont peurs, mais la rébellion n’est jamais bien loin.
Pendant ce temps le reste du monde paraît bien impuissant. Le 4 février une résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU devait exhorter Bachar al-Assad à adhérer au plan de la Ligue arabe. Elle prévoyait que le leader syrien, en place depuis douze ans, arrête toute action militaire et transfère son pouvoir. La Russie et la Chine ont opposé leur veto à ce qu’ils considèrent comme une ingérence occidentale dans les affaires internes d’un allié.
Quelques jours plus tard, alors que les bombardements sur la ville d'Homs atteignaient un nouveau degré de violence, l’ambassadeur russe Serguei Lavrov se rendait à Damas pour une visite officielle fortement critiquée. «Seule la Syrie peut décider du destin de M. Assad» a déclaré le diplomate. Soutenu par la Russie, l’Iran et la Chine, le régime syrien continue de faire régner la terreur dans les rues. Une stratégie délibérée d’après the Economist:
«Depuis le début du soulèvement il y a onze mois, la logique du gouvernement a été de cibler un village ou un quartier à la fois en représailles. Résultat: plus 7.000 civils ont péri à cause de cette tactique.»
Mais jusqu’ici les militaires intervenaient ponctuellement, avec violence certes, mais se retiraient ensuite, emmenant avec eux «des prisonniers coupables d’actes de terrorisme» comme les nomme le régime. Mais, depuis début février et le bombardement d'Homs, la répression semble s’orienter vers une nouvelle stratégie:
«Les troupes de Bachar al-Assad ont mis en oeuvre une brutale démonstration de force sans précédent (…). Avec les centaines de projectiles pleuvant sur Homs chaque heure, le nombre de victimes au niveau national a bondi de 20 à plus de 50 par jour».
Bachar Al-Assad semble ainsi vouloir «décapiter la révolte». Mais d’autres raisons expliquent aussi ce déferlement de violence. Selon l’auteur, al-Assad «se sent en sécurité à Damas», et ses forces de sécurité «n’ont connu jusqu’ici que peu de défections». La supériorité militaire du régime demeure incontestable. De plus la minorité Alawite du pays continuerait à le supporter. Les minorités chrétiennes et druzes se méfient quant-à elles des sunnites, au cœur de la contestation.
Face à un régime encore solide, l’opposition apparaît au contraire comme extrêmement «divisée». Les rebelles «organisent la résistance en comités locaux», des entités que le Conseil national syrien a bien du mal à coordonner. L’Armée libre de Syrie est finalement mal connue, certain la voyant comme «une émanation des Frères musulmans», supportée par Al-Qaeda, et d’autres comme «un outil aux mains des Américains».
Autant de facteurs qui laissent présager d’une accentuation
du conflit au cours des prochains jours. Bachar al-Assad «a peu de chance de survie sur le long terme», son Etat étant
enfoncé dans une crise économique profonde et son image ayant été
irrémédiablement détruite. Mais si aujourd’hui la majorité des Syriens «est convaincue que Bachar al-Assad va
partir, la question est de savoir comment».