Que peut-il bien se passer dans la tête d’un sniper qui, tapi dans l’ombre attend, cible et appuie sur la gachette? BBC News a cherché à savoir. Chris Kyle, le sniper le plus meurtrier de l’histoire américaine, revendique plus de 255 victimes à son actif depuis 2003 (160 selon le Pentagone), et raconte dans son autobiographie sa vie en embuscade, rapporte Le Monde Magazine. Son regret? «Ne pas en avoir tué davantage».
Dans ses mémoires, il écrit qu'il a exécuté ses victimes «parce qu'[il] pense que le monde est un endroit bien meilleur sans les sauvages qui prennent des vies américaines».
Il raconte également la première fois où il a dû prendre la décision d’abattre une cible. A travers la lunette de son fusil, il voit une femme qui s’approche de ses troupes, une grenade prête à exploser dans sa main. «Ce fut la première fois que j'allais avoir à tuer quelqu'un. Je ne savais pas si j'allais être capable de le faire, homme, femme ou autre chose» déclare-t-il.
Et ajoute:
«Vous gambergez. Premièrement, c'est une femme. Deuxièmement, dois-je le faire, est ce correct, est-ce justifié? (...) Quand je vais rentrer à la maison, les avocats vont-ils venir me voir en disant: "vous avez tué une femme, vous allez en prison"?»
Mais en réalité, il n’a pas vraiment le temps de donner une réponse à toutes ces questions. «Elle a pris la décision pour moi, c'était soit mes concitoyens américains meurent ou elle que j’élimine», résume-t-il. «Chaque personne que j'ai tué, je crois fermement qu'ils ont été mauvais» renchérit-il.
Une étude sur les tireurs d'élite en Israël, menée par l'anthropologue Neta Bar, a montré que les snipers sont beaucoup moins susceptibles que les autres soldats de déshumaniser leurs ennemis, rapporte BBC News. Cela peut notamment s’expliquer par le fait que les snipers voient leurs cibles avec une grande précision et doivent parfois les observer pendant des heures voire des jours.
Les snipers israéliens se justifient en disant qu’ ils ont empêché le meurtre d'innocents, et qu’ils ne sont alors pas désolé. Et c'est peut-être cela qui peut expliquer le fait qu’ils ne ressentent pas de traumatisme après le meurtre.
Cependant, l’étude ne parlait que des tireurs d'élite encore actifs. Neta Bare note que beaucoup d'entre eux pourraient rencontrer des problèmes dans les années à venir, après leur retour dans la société.
Par exemple, lorsque Ilya Abishev, un sniper de l'ex-URSS, a combattu en Afghanistan en 1988, il a été pris dans la spirale de la propagande soviétique et était convaincu que ce qu'il faisait était juste. Les regrets sont venus beaucoup plus tard. «Nous avons cru que nous défendions le peuple afghan». Et ajoute que «Maintenant, je ne suis pas fier, j'ai honte de mon comportement».