On a beau parler d’elle tous les jours, l'Allemagne ne sera sans doute jamais célèbre pour sa gastronomie. La preuve: la spécialité allemande la plus appréciée des Pékinois, c’est le kebab, raconte Suzann Sitzler dans l’hebdomadaire Die Zeit:
«Le döner a été introduit en 2000 par un homme d’affaires chinois, qui, de retour d’Allemagne, voulut ouvrir une échoppe semblable à celles qu’il avait vu partout. Et comme en Chine, imitation signifie témoignage de gratitude envers une bonne idée, l’homme ouvrit un «Döner allemand».
Depuis, la boutique a fermé, mais a laissé la place a quelques adresses de choix. Au cours d’une course de 22h à la recherche du meilleur «döner» de Pékin, la journaliste tombe sur un jeune vendeur qui l’accueille en lui demandant son origine:
«Germany! Good! Here eat Germany!». Sa technique ne se différencie en rien de ses collègues berlinois. Ses questions non plus: «Epicé ou pas trop?» (…) Le papier comporte même l’inscription «Turkey Döner Kebab», exactement comme en Allemagne. Différence notable, le prix: 5 yuan, quelque chose comme 60 centimes d’euros.»
Ce «plat allemand», raconte le Badische Zeitung, on le trouve aussi à Seattle, au nord-ouest des Etats-Unis. Au «Berliner», on mange des sandwichs dans une salle ornée de photos de la Porte de Brandenbourg et de graffitis. La journaliste note la réaction d’une cliente qui vient d’apprendre que l’Allemagne possède un Döner à chaque coin de rue:
«Ben dis-donc, vous en êtes, un peuple heureux!»
Alors, ce que les parisiens nomment le «Grec» est-il turc ou allemand? Un peu des deux, répond le Süddeutsche Zeitung dans une «petite histoire» du Döner (littéralement «broche tournante», en turc):
«La forme actuelle fut inventée le 2 mars 1971 par Mehmet Aygün, à Berlin. (…) A l’origine, c’est une assiette de viande accompagnée de riz et de sauce épicée. La sauce au yaourt aromatisée à l’ail fut développée pour la bouche moins aguerrie des Européens. C’est également pour eux que l’on débita la viande et qu’on la servit dans un petit pain.»
Les Allemands adorent le döner. Chez eux, on le mange non pas avec des frites, mais avec du choux rouge. Et face à cela, la currywurst, typiquement germanique, est totalement battue, précise l’article:
«Le ratio est le suivant: pour une currywurst vendue, ce sont cent Döner qui sont engloutis. Berlin compte 1.300 échoppes, soit plus qu’à Istanbul.»
Et à défaut de gastronomie allemande, se tient depuis un an la Döga, la «Döner Gastronomie», une foire rassemblant tous les professionnels européens du secteur. Pour la première édition, on y présenta la première machine à faire des Döner, dont la performance est à découvrir sur le site de la foire. Elle semble très efficace, mais coûte 10.000 euros.