Fin août 2010, la parution du best-seller L’Allemagne court à sa perte avait secoué l’Allemagne. Son auteur, Thilo Sarrazin, y évoquait notamment «la bêtise qui rampe» en raison de l’augmentation de l’immigration en Allemagne. Dans une interview, il avait parlé d’un «gène» que partageraient les Juifs et les Basques.
Un mois après l’éclatement de la polémique, Sarrazin démissionnait du directoire de la Bundesbank. Mais il était resté au SPD en attendant que la direction se prononce.
C’est chose faite depuis le 22 avril. A la suite d’une lettre d'explication de Thilo Sarrazin, le SPD a opté pour un accord à l’amiable et a annulé la procédure d’exclusion.
Au grand dam de nombreux membres du parti social-démocrate, raconte le quotidien Die Welt, qui ont signé une «Déclaration de Berlin» dans laquelle ils soulignent:
«La suffisance des élites, la stigmatisation de groupes –d’origine immigrée ou non–, les caquetages politiciens dédaigneux, et même le racisme n’ont pas leur place au sein de notre Parti. (…) Nos valeurs sont solides, et ne sont pas à la disposition de quelques-uns.»
La pétition a été signée par une centaine de sociaux-démocrates berlinois, dont plusieurs chefs de fédération.
Mais la direction ne s’en émeut pas. La secrétaire générale du SPD, Andrea Nahles, s’est immédiatement rangée derrière le discours officiel, lit-on dans la FAZ:
Selon Nahles, Thilo Sarrazin a pris ses distances avec les thèses contestées qu’il avait émises sur l’intégration des immigrés musulmans. Pour elle, l’accord à l’amiable et la décision de ne pas l’exclure seraient la voie la plus intelligente. Sarrazin, de son côté, a parlé de la victoire de la raison et de la culture de dialogue propre au SPD.
Mais le Stern considère ces explications comme sommaires, et y voit surtout un calcul politicien:
En excluant l’un de ses dissidents, le SPD allait surtout s’embarquer dans une longue bataille juridique. Car Sarrazin, social-démocrate depuis 40 ans, avait maintes fois annoncé son intention de porter plainte contre toutes les instances du Parti. Et en cette année électorale, ça aurait fait un peu tache. Et puis Berlin, la patrie de Sarrazin, élit un nouveau maire en septembre.
Pendant que Sarrazin reste, certains partent en signe de protestation, comme Sergey Lagodinsky, juif originaire de l’ex-URSS, et fondateur du groupe de travail des socio-démocrates juifs. La Sueddeutsche Zeitung cite la lettre de départ qu’il a écrite à Andrea Nahles:
«Sarrazin ne soulève pas le thème de l’intégration, mais celui de la tolérance. Sarrazin ne soulève pas le thème de la liberté d’opinion, mais celui du respect. Que le Parti ne voit pas cela est le symptôme d’un Parti qui se cherche et ne trouve que du vide.»