Le grand déballage de télégrammes diplomatiques de WikiLeaks a levé le voile sur les bruits de couloirs des disputes diplomatiques et autres noms d’oiseaux utilisés par l’administration américaine. Mais il a également révélé des comportements pour le moins condamnables de la part du gouvernement américain et de prestataires de service armés. Dans cette dernière catégorie, The Guardian rapporte les inquiétudes du gouvernement afghan concernant les agissements des employés de DynCorp. Cette entreprise de sécurité privée dont le siège social est près de Washington et qui s’occupe notamment de recruter des policiers afghans est accusée d’avoir organisé une fête pour des nouvelles recrues avec bien plus que de simples confiseries et des sodas.
Selon Houston Press, il s’agissait d’une fête de bacha bazi [«jeu de garçons»], qui consiste à faire danser «de manière séductrice et devant une salle enfumée pleine d'hommes plus âgés et libidineux» des garçons de 8 à 15 ans habillés en femme. Après la danse, «leurs services sont mis aux enchères». Le documentaire ci-dessous, qui a été diffusé à la télévision aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et en France sur France 5, a enquêté sur la pratique (il ne s’agit que de la première partie sur deux, l'autre est sur YouTube).
Le département d’Etat qualifie les bacha bazi de «forme de viol masculin culturellement accepté et très répandu»; apparemment, DynCorp considère ces fêtes comme une tactique de recrutement. Le gouvernement américain a été mis au courant des fêtes quand des responsables afghans ont entendu parler d’un journaliste qui enquêtait sur de telles pratiques. Un télégramme du 29 juin 2009 relate la rencontre entre le vice-ambassadeur américain Joseph Mussomeli et le ministre de l’Intérieur afghan Hanif Atmar, au cours de laquelle ce dernier a fait part de son inquiétude quant à la fête organisée par des Américains.
L'ambassade a conseillé aux Afghans de ne pas s’inquiéter, et pour cause. Quand le Washington Post a sorti l’information en juillet 2009, les bacha bazi étaient déjà devenus une question de «gestion discutable» dans laquelle des employés de DynCorp «ont loué les services d’un adolescent pour effectuer des danses tribales lors d’une fête de départ de l’entreprise et ont filmé la scène». Le porte-parole de l’entreprise déclarait alors: «Ne confondez pas une faute professionnelle individuelle avec un échec dans la réponse de l’entreprise».