«Salariés, levez-vous!» Ce n'est pas un appel à la révolte, ni un cri contestataire. Mais tout simplement une bonne recommandation... D'après une étude publiée sur l'American Journal of Epidemiology, qui a suivi 123.000 adultes pendant plus de quatorze ans, travailler debout serait bon pour la santé. Abandonner le fauteuil au bureau favoriserait la concentration, aiderait à lutter contre la somnolence, le diabète, l'obésité, et les maladies cardiaques... Travailler debout allongerait même notre durée de vie: ainsi ceux qui restent assis pendant plus de six heures sont 18% plus susceptibles de mourir pendant la période étudiée que ceux qui restent assis moins de trois heures, explique JP News.
Cette théorie a fasciné l'endocrinologue James Levine, qui explique comment nous sommes devenus un peuple «assis». Il est d'ailleurs le premier à lutter contre les méfaits du fauteuil: il a fait installer un tapis roulant dans son bureau pour pouvoir marcher toute la journée au travail, explique le Washinton Post.
Et il n'est pas le seul à promouvoir le travail debout. Le quotidien américain recense quelques exemples de travailleurs qui refusent de s'asseoir. Mark Ramirez, par exemple. Responsable d'équipe chez AOL, il pourrait se glisser dans un comfortable fauteuil en cuir. Mais non, il préfère travailler toute la journée debout, à son bureau qu'il a fait élever au niveau de son estomac. Dans les 10 dernières années, 10% des employés d'AOL dans le campus de Dulles se sont mis au travail debout. Les ventes de GeekDesk, une entreprise qui vend des bureaux élevables à 800$ (environ 578 euros), ont triplé cette année. Parmi ses clients, les services secrets et la U.S Geological Survey (Institut d'études géologique des États-Unis).
Et tous ceux qui abandonnent le fauteuil ne sont pas forcément au courant que cela allonge leur durée de vie. Kate Kirkpatrick, par exemple, travaille debout, mais elle ignore les débats autour des méfaits du fauteuil. Cadre chez Gensler, agence d'architecture et de design américaine implantée mondialement, elle a abandonné son siège l'année dernière, à cause d'une blessure qui l'empêchait de s'asseoir. Mais quand la blessure est partie, Kirkpatrick est restée debout. Elle a fait accrocher un clavier à son bureau, qui peut s'élever, donc elle peut l'utiliser tout en étant debout.
«Je n'ai plus de coup de barre au milieu de la journée, explique-t-elle. Mon corps est plus sain. Et je n'ai plus cette sensation d'oppression au niveau du cou qu'on a quand on passe la journée assis.»
Pour Marc Hamilton, chercheur à la Pennington Biomedical Research Center en Louisiane, «rester assis est dangereux. Nous sommes à la veille d'une révolution majeure sur ce que nous considérons comme des comportements sains au travail». Il compare les dangers du siège à ceux de la fumée.
Mais tout le monde dans le milieu scientifique n'est pas aussi radical en ce qui concerne le fauteuil. Passer la journée debout serait aussi dangereux, et provoquerait des problèmes de dos à long terme, comme le montre l'exemple des ouvriers dans les usines. Et les femmes auraient plus de chances d'avoir des veines variqueuses. Le coeur aussi pourrait en souffrir, car il devra battre davantage. Ainsi pour Alan Hedge, spécialiste en ergonomie à le Cornell University, «travailler debout est l'une des choses les plus stupides qu'on puisse faire».
Pour lui, la stratégie la plus efficace consiste dans l'adoption d'une position neutre: légèrement inclinée, le clavier au-dessus du niveau du ventre. Cette position favorise la circulation du sang. Les employés devraient aussi marcher de temps en temps, s'étirer et éviter de rester trop longtemps assis au bureau. Pour ce spécialiste, la clé de la santé, c'est le mouvement, pas le fait de rester debout tout le temps.
Photo: WomanFactory1940s, Hollem, Howard R via Wikimedia