Les singes pourraient disparaître d’ici vingt-cinq à cinquante ans expliquait en janvier dernier une étude de Science Advances. Déjà 75% des populations de primates accusent un déclin. Pendant deux ans, la photographe espagnole Isabel Munoz a travaillé sur les grands singes pour souligner «la nécessité absolue de les préserver de même que la nature». Sa série se présente comme un album de portraits de famille. Elle est exposée pendant le festival Kyotographie, du 15 avril au 14 mai 2017, au Japon.
Serie Primates, 2014. Lola Ya Bonobo, República Democrática del Congo | Isabel Munoz
«Toute ma vie j’ai été intéressée par l’être humain. Je voulais savoir d’où nous venons, où nous allons, ce que nous avons appris et ce que nous avons perdu.»
Serie Primates, 2015. La Vallée des Singes, Romagne, Francia | Isabel Munoz
«Par contre, je n’aurais jamais pensé que j’allais travailler sur la nature parce que j’ai toujours cru qu'elle avait quelque chose de magique et qu’on ne pouvait rien y ajouter de nouveau.»
Serie Primates, 2014. Zoo de Madrid, España | Isabel Munoz
«Puis j’ai commencé cette série photographique sur les grands singes en travaillant sur un gorille et sa famille dans le zoo de Madrid avant d’avoir envie de les voir en liberté. C’est à ce moment-là que je suis allée en République Démocratique du Congo.»
Serie Primates, 2014. Zoo de Madrid, España | Isabel Munoz
«J’y ai photographié des gorilles qui se trouvaient à l’est du pays. Mais je ne voulais pas travailler au sein d'un groupe de touristes. Je souhaitais découvrir les gorilles seule. Le directeur du parc a compris mon projet et m’a aidé mais à cause des guérillas et du braconnage les expéditions étaient parfois un peu compliquées. Les bébés singes sont enlevés par les braconniers pour être vendus et tous les singes qui se mettent sur leur passage pour protéger les petits sont massacrés.»
Serie Primates, 2015. Lola Ya Bonobo, República Democrática del Congo | Isabel Munoz
«Je pense que les Bonobos sont l’espèce la plus fascinante. C’est une société matriarcale qui règle ses problèmes sociaux en faisant l’amour, même avec les bébés. Les femelles ont le pouvoir parce qu’elles savent quand elles vont être fertiles et elles ne laissent ces moments de fertilité qu’au mâle le plus puissant pour qu’il protège ensuite l’enfant. Le reste du temps, ces singes vivent dans une liberté sexuelle totalement libre.»
Serie Primates, 2015. Lola Ya Bonobo, República Democrática del Congo | Isabel Munoz
«Les Bonobos sont extrêmement intelligents. Si l’un des mâles trouve des noix, il prend une pierre pour les casser et les garde pour ensuite faire un échange avec une femelle contre du sexe. Ils connaissent aussi les plantes qui soignent les blessures et se soignent entre eux.»
Serie Primates, 2015. Camp Leakey. Borneo | Isabel Munoz
«Je suis ensuite allée voir les orangs-outangs à Bornéo. Ce travail sur les singes m’a permis d’apprendre beaucoup sur eux, mais aussi sur nous. On voit dans les images qu’ils sont capables de sentir la jalousie, l’amour, le pouvoir, la générosité, la tristesse. Parfois ils s’embrassent et comme nous, ils ferment les yeux pour pouvoir sentir l’autre.»
Serie Primates, 2015. Orangutanes, Camp Leakey, Borneo | Isabel Munoz
«Ces singes ont le même rapport que nous à la maternité. On peut voir sur cette image la mère prendre avec délicatesse la main du bébé dans la sienne. Ils élèvent entre 4 et 5 bébés en même temps qu’ils gardent jusqu’à l’âge de 5 ans pour leur transmettre toutes leurs connaissances jusqu’à ce qu’ils puissent partir seuls.»
Serie Primates, 2014. Lola Ya Bonobo, República Democrática del Congo | Isabel Munoz
Serie Primates, 2015. La Vallée des Singes, Romagne, Francia | Isabel Munoz
«Ce qui est drôle c’est que les singes ont la même curiosité et le même comportement de malaise que les Hommes quand on les met devant un appareil photo. Ils peuvent nous sentir, nous reconnaître. Un jour, en me voyant arriver, un bonobo a mimé l’objectif de mon appareil photo. D’ailleurs les Bonobos ont 98% d’ADN en commun avec nous.»
Serie Primates, 2015. La Vallée des Singes, Romagne, Francia | Isabel Munoz
«Les femelles peuvent se faire accepter par d’autres communautés mais pas les mâles. Les mâles sont protégés au début par la mère mais quand ils commencent à grandir, ils entrent en concurrence avec le père et ils doivent disparaître de la famille pour vivre seuls ou fonder leur propre famille. Ce qui pose la question terrible des zoos, où il n’est pas forcément possible d’emporter les mâles dans des espaces différents.»