L’étude Pisa de l’OCDE dresse un état de l’école en évaluant le niveau des élèves. Une fois qu’on a dit cela, on a un peu tout et rien dit car qu’est-ce qu’un niveau scolaire? Une somme de connaissances? Des connaissances, des savoir-faire et des «compétences», puisque c’est le mot qu’on a choisi en France et qui a donné son nom au «socle de compétences»? Il faut se pencher sur une notion que l’OCDE utilise dans son test Pisa: la littératie.
Le mot n’existe pas dans le dictionnaire. C’est une traduction de l’anglais literacy. Selon l’OCDE, la littératie est «l’aptitude à comprendre et à utiliser l’information écrite dans la vie courante, à la maison, au travail et dans la collectivité en vue d’atteindre des buts personnels et d'étendre ses connaissances et ses capacités».
Le terme était déjà arrivé en France, avec un sens légèrement différent, dans le monde de la sociologie via des traductions d’ouvrages anglo-saxons. En maths, on parle de numératie:
«La numératie correspond à la capacité d'une personne de comprendre et d'utiliser des données mathématiques à l'école, au travail et dans la vie de tous les jours; par exemple, pour utiliser de la monnaie et établir des budgets, pour utiliser des mesures en cuisine ou pour lire une carte.»
Ces concepts sont utiles car ils connectent les apprentissages scolaires à leur réutilisation en général en vérifiant la capacité des élèves à les mobiliser. Une critique classique des travaux de l’OCDE ciblait le côté un peu bas du casque de l’enquête qui s’intéresserait davantage aux compétences et aux savoirs utiles qu’aux connaissances théoriques (en fait, d’après Pisa, les élèves français ne sont pas très bons pour les parties les plus scolaires du test).
La littératie inclut l’utilisation des connaissances en milieu scolaire.
Et donc, nos mauvais élèves qui obtiennent les plus mauvais résultats à Pisa sont également ceuxqui sont les plus mauvais en littératie et en numératie. Ce que confirmait une autre étude, PIRLS, sur le niveau de lecture des élèves du primaire.
Les enfants français étaient plus mauvais en compréhension qu’en déchiffrage. Et surtout en compréhension de textes informatifs. Ce qui signifie que, pour eux, l’école n’a qu’une utilité très limitée, au fond...
Oui, il y a un problème avec la littératie et les compétences. Il est toujours facile de critiquer l’utilitarisme scolaire, mais la France ne brille pas non plus par l’extraordinaire culture de ses élèves. Ces derniers doivent théoriquement acquérir des savoirs nobles, une culture générale et disciplinaire commune et c’est la plus belle des missions de l’école. Mais que sauraient-ils en faire s’ils ne sont même pas capables de mobiliser leurs acquis du primaire et du collège pour vérifier une addition au restaurant ou pour comprendre un article de journal?
Louise Tourret