Il est mort dans la nuit du 25 au 26 novembre des suites d'une infection pulmonaire à l'hôpital Rossini-Sainte-Périne de Paris. Lucien Neuwirth avait 89 ans. L’annonce de sa mort a été faite sur le site du quotidien Le Figaro où travaille son épouse Sophie Huet.
Lucien Neuwirth était le pendant politique masculin de Simone Veil. Comme elle, il avait laissé son nom à une loi dissociant la sexualité de la reproduction. Comme elle, il avait dû affronter son camp politique (la droite) pour convaincre que cette dissociation, loin de provoquer une «débauche sexuelle», constituait une mesure essentielle de santé publique. Ce fut aussi une étape majeure dans l’évolution de la société française et l’un des évènements fondateurs de la quête à la parité.
Lucien Neuwirth était parvenu un an avant les «évènements de 1968» à faire voter une loi autorisant la commercialisation des pilules permettant aux femmes de disposer d’une contraception orale. Commercialisation mais non remboursement. Bien que donnant son nom à cette loi, Lucien Neuwirth demeura largement méconnu de l’opinion. Et il ne chercha pas à tirer une gloire personnelle, politique ou médiatique, de son action en faveur de la contraception.
Rien ne prédestinait ce gaulliste résistant et miraculé à déposer sa proposition de loi le 18 mai 1966, jour de son 42e anniversaire, «pour marquer son respect de la naissance». Enfant de Saint-Etienne (Loire), il est à Yssingeaux le 18 juin 1940 quand il entend, par le plus grand des hasards, l’appel radiophonique du général de Gaulle. Il dira plus tard que De Gaulle «disait ce qu’il pensait». Il entre aussitôt en résistance, s’engage en 1942 dans les Forces françaises libres, rejoint les parachutistes SAS français, participe à la Libération, poursuit le combat en Belgique, aux Pays-Bas. Fait prisonnier, il survit au peloton d’exécution. Sa biographie retient que blessé et recouvert par le corps d'un de ses camarades, il survit miraculeusement, «grâce à de la petite monnaie qui bloque la balle du coup de grâce».
C’est ensuite l’adhésion au RPF, l’élection comme conseiller municipal à Saint-Etienne, la découverte des premières militantes d’une action féministe qui deviendra le Mouvement français pour le planning familial. C’est alors qu’il repart en croisade pour abroger la loi de 1920 qui criminalisait la propagande anticonceptionnelle. Une croisade victorieuse grâce à l’action de Gregory Pincus qui mit au point les premières pilules assurant une contraception orale.
Réélu député de la Loire de 1958 à 1981, vaincu par la «vague rose», il sera sénateur de 1983 à 2001. Celui qui échoua régulièrement à devenir maire de Saint-Etienne gardait modestement en mémoire la date de son triomphe politique: le 29 décembre 1967.
J.Y.N