France / Politique

La bataille de Paris va faire un crochet par l'Assemblée

Temps de lecture : 3 min

Plusieurs élus de droite vont se plaindre du rééquilibrage des sièges au conseil municipal entre les arrondissements dominés par la droite et ceux dominés par la gauche, prévu par le projet de loi du gouvernement sur les élections locales.

Une séance du Conseil de Paris, le 21 mars 2008. REUTERS/Pierre Verdy/Pool.
Une séance du Conseil de Paris, le 21 mars 2008. REUTERS/Pierre Verdy/Pool.

La bataille de Paris a déjà commencé dans les médias, avec la déclaration de candidature de Nathalie Kosciusko-Morizet face à la première adjointe de Bertrand Delanoë, Anne Hidalgo, probable candidate du PS. Elle aura sans doute lieu aussi sous peu, discrètement, à l'Assemblée nationale, dans le cadre de l’examen du projet de loi sur les élections locales, qui arrive devant les députés ce lundi 18 février après avoir été rejeté par le Sénat en janvier.

Au nom de la «représentativité démographique», le texte prévoit en effet d’enlever un siège au Conseil de Paris à trois arrondissements dirigés par la droite (VIIe, XVIe et XVIIe) et d’en ajouter un à trois arrondissements dirigés par la gauche (Xe, XIXe et XXe), les conseillers municipaux parisiens étant élus à la proportionnelle au sein des arrondissements.

Une révision qui avait été réclamée mais pas effectuée sous le précédent gouvernement de gauche. La répartition des conseillers par arrondissement n’a en effet pas bougé depuis la loi «Paris-Lyon-Marseille» (PLM) de 1982, qui se fondait elle-même sur les chiffres du recensement de... 1975. Or, depuis, quatorze arrondissements de Paris ont vu leur population baisser et six augmenter, parfois dans des proportions importantes: -30% dans le IVe, +30% dans le XIXe.

Trois amendements

Dénonçant une «répartition arbitraire et sur-mesure pour la majorité de gauche», l’opposition a déposé trois amendements visant à modifier le texte gouvernemental, dus respectivement à Bernard Debré, à un groupe de députés UMP non-parisiens et au vice-président du groupe UDI François Sauvadet. Certains reproches adressés sont très ciblés: député-maire du XVIe, Bernard Debré reproche ainsi au gouvernement de ne pas avoir tenu compte des derniers chiffres de l’Insee (qui montrent que son arrondissement a gagné près de 1.800 habitants en un an, alors que le Xe et le XXe en ont perdu) ni des projets d’aménagement urbains du XVIIe.

Lors de l’examen du texte au Sénat, la droite, dont tous les amendements avaient été rejetés, s’est également indignée de ce que seul Paris soit visé par ce rééquilibrage, ce à quoi Manuel Valls a répondu qu’en 1987, sous un gouvernement de droite, le cas de Marseille avait déjà été examiné à part.

Le débat s’est même déplacé sur... le vote des étrangers, Gérard Longuet pointant que le nombre d’électeurs n’est pas proportionnel au nombre d’habitants dans chaque arrondissement:

«Ce ne sont pas toujours des électeurs qui viennent grossir les différents quartiers de Paris. […] La perspective du vote des étrangers explique que vous intégriez déjà comme des électeurs ceux qui ne sont que des habitants, en leur permettant par leur simple existence de justifier des élus supplémentaires.»

Selon nos calculs, si la population parisienne compte environ 56% d’électeurs inscrits, les arrondissements sous la moyenne se situent à gauche (IIe, Xe, XVIIIe —50% d’électeurs seulement—, XIXe et XXe) mais aussi à droite, où il s’agit d’ailleurs de ceux concernés par le rééquilibrage (VIIe, XVIe et XVIIe).

«La voix d’un électeur du centre vaut près du double»

Mais le reproche qui revient le plus souvent dans l’opposition est l’absence de prise en compte d’un déséquilibre démographique qui fait que, selon le sénateur de Paris Pierre Charon, «la voix d’un électeur du centre de la capitale vaut près du double de celle de tout autre électeur parisien». Si, à Paris, la moyenne est environ de 14.000 habitants par conseiller municipal, le IIIe en compte moins de 12.000, le IVe moins de 10.000, le IIe moins de 8.000 et le Ier moins de 6.000...

Tandis que Charon réclamait un débat sur le regroupement en un seul des quatre premiers arrondissements, ses collègues UDI Yves Pozzo di Borgo et Chantal Jouanno ont eux proposé que les trois sièges retranchés le soient finalement dans les Ier, IIe et IVe arrondissement, seul le Ier étant actuellement contrôlé par la droite.

Avec pour inconvénient que ceux-ci ne seraient plus représentés que par deux conseillers de Paris, là où un minimum de trois, a souligné le gouvernement, était jusqu’ici la règle... Ce à quoi l’opposition a répliqué que cette même règle ne découlait que d’un amendement parlementaire adopté il y a trente ans, là où le projet initial du gouvernement Mauroy prévoyait justement un minimum de seulement deux élus.

Un électorat trop concentré

Autant de débats qui soulignent en creux une des principales faiblesses de la droite parisienne, sa position géographique extrêmement précaire. Même si celle-ci rééquilibrait le rapport de forces dans la capitale (où François Hollande a recueilli 55% des voix le 6 mai 2012), elle ne serait pas sûre de remporter la mairie: en 2007, une transposition par arrondissement des résultats de la présidentielle, où Sarkozy devançait Royal de moins de 0,1 point sur l’ensemble de la ville, la laissait près de vingt sièges derrière la gauche…

L’électorat de droite est en effet très concentré dans le «triangle d'or» VIIe-VIIIe-XVIe, où elle frôlait parfois les 80% en mai dernier, là où la gauche dépassait de peu les 70% dans ses fiefs. Un des principaux défis de l’opposition en 2014 sera donc d’étendre sa zone d’influence, par exemple via une éventuelle candidature de sa tête de liste dans le XIVe.

J.-M.P.

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