François Hollande et le gouvernement n'auront pas besoin des députés écologistes ou du Front de gauche pour obtenir la confiance de l'Assemblée nationale et pour faire passer leurs projets de loi: le PS et ses alliés radicaux de gauche, divers gauche et chevènementistes obtiennent 314 sièges, plus que la majorité absolue (289).
Premier groupe de l'histoire d'EELV
Mais les craintes d’EELV peuvent au moins être apaisées sur un point: le parti pourra bien constituer un groupe parlementaire à l’Assemblée, pour la première fois de son histoire, puisque 17 de ses candidats l'ont emporté.
Si lors de l’accord passé entre EELV et le PS, il pouvait espérer un groupe plus large (autour de 30 députés), les dissidences à gauche ont rendu sa position plus précaire. Au premier tour, dans neuf circonscriptions, des dissidents avaient mis en échec les candidats EELV, par exemple dans le Rhône, où le dissident Thierry Braillard (PRG, appuyé par Gérard Collomb) s'était qualifié à la place de Philippe Meirieu (EELV), avant de l'emporter au second.
Dimanche aussi, les divisions ont pu peser: dans la circonscription de Toulouse-Balma, François Simon, soutenu par le PS mais qui avait dû faire face à un dissident au premier tour, a ainsi été battu par l'ancien maire UMP de Toulouse, Jean-Luc Moudenc, de 350 voix. A Roubaix, Slimane Tir, également soutenu par le PS, a été battu par le député PS dissident Dominique Baert.
Le parti perd par ailleurs un de ses trois députés sortants (Anny Poursinoff, dans les Yvelines) mais remporte donc quinze nouveaux sièges: citons Cécile Duflot (qui va être suppléée... par une socialiste) et Denis Baupin à Paris, Jean-Louis Roumégas dans l'Hérault, Danielle Auroi dans le Puy-de-Dôme (où elle a détrôné le fils Giscard d'Estaing), les jeunes Barbara Pompili et Eva Sas dans la Somme et l'Essonne ou Sergio Coronado en Amérique centrale et du Sud.
Si le groupe ne sera donc pas énorme à l’Assemblée, il est au moins sûr d’exister. Jean-Vincent Placé, patron des sénateurs d'EELV, a évoqué dimanche auprès de l'AFP un «groupe qui semble acquis pour peser, pour changer de démocratie, et aller vers une République bien plus parlementaire».
Le Front de gauche en mauvaise position
Le score du Front de gauche, en revanche, est extrêmement décevant, avec 10 sièges —contre 19 dans l'Assemblée sortante. Cela est dû à plusieurs facteurs, dont les cas de désistement au second tour en cas de duel gauche/gauche. Comme Slate.fr l’expliquait dans l’entre-deux-tours, la règle du «désistement républicain» en faveur du candidat le mieux placé, lors de triangulaires, s'applique parfois en cas de duels entre députés de partis proches, pour rester maîtres de la situation et ne pas accorder une marge de manœuvre trop importante aux électeurs du camp adverse.
Neuf candidats du Front de Gauche ont ainsi favorisé le PS en se désistant, tandis que le PS ne s’est désisté que quatre fois en faveur du Front de Gauche, profitant de sa position de force acquise au premier tour. Et dans la circonscription où ce désistement ne s'est pas fait, la deuxième de Seine-Saint-Denis, le maire de Saint-Denis Patrick Braouezec a perdu face au socialiste Mathieu Hanotin.
Néanmoins, le PS pourrait abaisser à 10 le seuil de 15 députés nécessaires pour composer un groupe parlementaire. Jean-Luc Mélenchon a redit, dimanche soir, son souhait de voir cet abaissement mis en œuvre, déclarant sur France 2:
«Une force politique comme la nôtre, qui a réuni quatre millions de voix à l'élection présidentielle, et qui fait 600.000 voix de plus que le Parti communiste en 2007, perd la moitié de ses sièges! (...) Ce système [électoral] est absurde!»
Jean-Luc Mélenchon tient les socialistes pour en partie responsables de cette défaite du Front de Gauche, déplorant «l'énergie» déployée par les socialistes «pour essayer de faire perdre partout les candidats du Front de gauche».
C.P.