À VILLEPINTE CE DIMANCHE 11 MARS, Nicolas Sarkozy a eu des références «vaguement nixoniennes» selon un article du New York Times, notamment en qualifiant ses supporters de «majorité silencieuse». Si l’expression n’a pas été inventée par Richard Nixon, 37e président des Etats-Unis, il l’avait popularisée dans un discours du 3 novembre 1969 sur la guerre du Viet-Nam.
Nicolas Sarkozy avait déjà repris l’expression auparavant, dans son discours de Saint-Quentin en mars 2009, évoquant «cette majorité silencieuse qui n'a pas les moyens de se mettre en grève (ou) de manifester», et elle est revenue plusieurs fois depuis que le président-candidat est entré en campagne.
Comme nous l’écrivions au moment de son passage télévisé dans Des Paroles et des Actes, (quand cette «majorité» était encore une fois invoquée), l’expression est un classique du répertoire de la droite française depuis une quarantaine d’années.
Contre les élites
L’analogie avec Richard Nixon s’entend aussi dans l’approche que Nicolas Sarkozy a de la culture. En faisant remarquer à Villepinte –pour la énième fois– que ce n’était pas les intellectuels qui feraient l’élection, les assimilant au milieu parisien, il est revenu à sa marotte selon laquelle lui ne fait pas partie de ces élites énarques –ce qu’il avait déjà rappelé dans Des Paroles et des Actes.
Dans une chronique de l’Express, Frédéric Martel, qui évoque les rapports entre l’ancien président américain et l’actuel président français, tous deux avocats d’affaires avant d’entrer en fonction, avance que «leurs rapports respectifs à la culture» sont «caricaturalement middlebrow, c'est-à-dire ni vraiment populaire (low), ni élitiste (high) mais la culture de l'entre-deux, une culture moyenne pour deux hommes en quête de self-aggrandizement et de statut social, des hommes qui incarnent jusqu'à la caricature la culture du parvenu en quête d'un statut social –et donc culturel».
Dans sa chronique, Frédéric Martel rappelle que cette proximité entre les deux hommes se voit dans le «cynisme politique extrême et de la paranoïa maladive (Nixon dans ses rapports au FBI puis dans l'affaire du Watergate, Sarkozy avec la DCRI du désormais célèbre Bernard Squarcini, dit "le Squale")». Et il pousse encore la comparaison:
«Vrai encore de la politique économique brouillonne, des paris diplomatiques les plus fous (Nixon pariait en Chine comme Sarkozy en Libye), et d'une absence confondante d'idéologie et de "colonne vertébrale" (…) Sans parler du double-jeu de leurs discours, des critiques violentes à l'égard de la presse et de tous les corps intermédiaires (les fonctionnaires, les magistrats, les diplomates, les hauts fonctionnaires).»
En 2010, Vanity Fair voyait même dans l’affaire Woerth-Bettencourt un écho du Watergate. «Comme Nixon pendant le Watergate, Sarkozy risque de mourir à petit feu avançait l’article et il tente de minimiser les dégâts. Et comme ils l'ont fait pendant le Watergate, les hommes politiques les plus puissants, ceux qui étaient au cœur du scandale, sont restés à leur poste alors que leurs collaborateurs ont été jetés par-dessus bord comme du ballast. Et comme lors du Watergate, je présume que les révélations vont se poursuivre.» Richard Nixon fut réélu pour un second mandat en 1972. Deux ans plus tard, il démissionnait.