Et si Vincent Maraval, conscient de la médiocrité du film d'Abel Ferrara qu'il produit sur l'affaire DSK, Welcome to New York, avait organisé tout ce foin autour du film rien que pour le faire exister malgré tout?
Depuis quelques semaines, le film est l'événement du Festival de Cannes auquel il n'est pas programmé. D'abord par son sujet, bien sûr, exploré pile trois ans après la chute de celui qui était alors président du FMI, et s'acheminait vers la présidence de la France.
Par sa méthode de distribution ensuite: directement en VOD, sans passer par la case salles. Ensuite, pour les festivaliers, par le suspense sur le rapport au Festival: sera-t-il programmé? Sera-t-il le film de clôture? En séance spéciale? Comment, pourquoi? Quand, bordel, pourra-t-on voir Depardieu en Devereaux (alias de DSK dans le film), incarner l'homme politique le plus méprisé de France (pour l'instant) se bourrer au champagne comme un tonneau et caresser des prostituées; et Jacqueline Bisset en épouse blessée, honteuse?
Le Monde l'a enfin annoncé ce vendredi, il était temps: pour les festivaliers ce sera le samedi 17 mai à 20 h 30, dans un cinéma de la Croisette (Le Star), dans quatre salles. Puis il y aura une projection «sous une tente, en présence de Gérard Depardieu, d'Abel Ferrara, de l'équipe de Wild Bunch. Elle sera suivie d'une conférence de presse qui s'annonce animée, sinon tendue. Puis, vers minuit, du lancement du film en VoD, pour 7 euros, sur les box Orange et Free, sur iTunes, Canal Play, myTF1, Video Futur, FilmoTV, Netflix ou encore Google Play. La soirée se terminera par une fête dont Vincent Maraval, le coproducteur du film, nous assure qu'elle sera du plus mauvais goût.»
Excitant? Pas tant que ça quand on se rend compte que les critiques ayant pu déjà voir le film, à la faveur d'une projection privée, l'ont en fait trouvé plutôt mauvais.
Le Nouvels Obs «est désolé de l’avouer: on s’ennuie ferme devant Welcome to New York, tout du moins dans la version extensive, plus de deux heures, à laquelle s’accroche Ferrara».
Le Monde qui le trouve parfois passionnant, car «aussi mal dégrossi et suicidaire que son personnage, alternant des moments magnifiques et d'autres assez patauds, au risque de se saborder lui-même» a néanmoins un reproche précis qui rend le film «indéfendable»:
«La question qui fâche est celle du rôle de Simone, l'épouse de Devereaux. Elégante femme de pouvoir dont les projets s'effondrent quand elle apprend la chute de son mari, elle reste solidaire pour préserver leurs intérêts communs, mais de mauvaise grâce. Tout irait bien si le premier trait qui la caractérise n'était la double allusion à sa fortune et à l'usage qu'elle en fait comme grande donatrice à Israël. Cette scène, qui semble ne servir qu'à poser l'équation entre les juifs, le pouvoir et l'argent, donne dans le fantasme antisémite.»
Quelques réalisateurs ont en revanche apprécié le film: comme Gaspard Noé (dont le film Enter The Void avait été distribué par Maraval...) qui l'a trouvé «couillu».