Vous avez sans doute vu passer ce jeu NSFW (de grandes images de vulves et de pénis en érection sont susceptibles de s'afficher sur votre écran si vous cliquez sur le lien) sur les réseaux sociaux depuis le lundi 16 décembre. Explicitement intitulé «Fashion or porn» (sur le modèle d'autres jeux récents comme l'excellent «Serial killer or hipster»), il propose à l'internaute innocent que vous êtes des détails de photos d'hommes et de femmes dénudés. Le but est de deviner si elles sont tirées d'une image de mode ou d'une image pornographique.
Autant le dire tout de suite, l'exercice est très difficile. C'est d'ailleurs la raison d'être du jeu imaginé par le magazine italien nssMag. Car derrière l'amusement et la dimension virale se pose une vraie question: si nous n'arrivons plus à faire la distinction entre les deux, le porno et la mode sont-ils vraiment si différents?
Kate Hakala du site Nerve, qui se décrit comme le «centre culturel de l'Internet pour le sexe, l'amour et la culture», s'est intéressée à la démarche du jeu. Elle qui «regarde des images pornographiques» dans son travail quotidien avoue avoir obtenu des scores particulièrement bas, et y voit le résultat d'une certaine dérive de l'industrie de la mode:
«La publicité de mode d'aujourd'hui est envahie par les photographes et les réalisateurs du genre du très dénigré photographe millionnaire Terry Richardson, dont l'esthétique entière repose sur l'objectification pornographique de la femme.»
Terry Richardson, en plus d'être connu pour aimer prendre en photo des filles les plus nues possibles et les rendre aussi mal à l'aise que possible, voire les harceler sexuellement –quand elles ne sont pas célèbres, fait en gros toujours les mêmes photos, qui ressemblent à celle-ci de Miley Cyrus:
Le débat sur la tendance à la sexualisation dans la publicité n'est pas nouveau, et vous pouvez retrouver les plus récentes réflexions médiatiques autour du sujet ici ou ici. Une explication souvent avancée au phénomène est d'ordre économique: les femmes (et plus rarement les hommes) nues font vendre.
Nous vous parlions ainsi au début du mois de cette étude publiée par le journal de Psychological Science montrant que les femmes, si elles trouvent l'objectification pornographique de la femme dans la publicité dégradante voire insultante, acceptent que le corps féminin devienne objet d’érotisme s'il s'agit d'objets ou de vêtements de luxe.