Le feuilleton mythique de votre enfance pourrait être moins innocent qu’il n’y paraît.
Tiré de romans pour la jeunesse écrits par Laura Ingalls Wilder, sur la base de ses propres souvenirs d’enfance dans une famille de pionniers américains, La Petite maison dans la prairie serait en fait une fable libertarienne. C’est du moins la thèse défendue dans le Boston Globe par Christine Woodside, qui souligne l’implication dans l’écriture de l’histoire de la fille de l’auteur, Rose Wilder Lane.
Celle-ci était une journaliste farouchement opposée au New Deal, proche du mouvement libertarien (vous savez, ceux qui, aujourd’hui, comparent les Etats-Unis à Rome avant sa chute), dont elle a écrit un des ouvrages de référence, The Discovery of Freedom (1943).
D’après Christine Woodside, l’étude comparée des mémoires brutes de Laura Ingalls Wilder et du livre pour enfants qui en découle, après les remaniements de Rose Wilder Lane, révèle de nombreuses modifications.
La fille aurait utilisé le livre de la mère comme support pour diffuser ses idées politiques anti-interventionnistes. Par exemple, alors que tout un passage de La Petite maison dans la prairie relate le dur travail effectué par Laura pour pouvoir scolariser sa sœur aveugle dans un établissement spécialisé, les mémoires de Laura Ingalls révèle que les frais de cette scolarisation avaient en fait été pris en charge par le gouvernement du Territoire du Dakota (aujourd’hui Dakota du Nord et Dakota du Sud).
«Il en résulte une série de livres qui ont contribué à instiller une représentation profondément ancrée des valeurs de la Frontière, en particulier l’idée que les Américains isolés peuvent prospérer parce que le gouvernement les laisse libres de s’appuyer uniquement sur leur propre énergie et sur leur propre éthique.»
Une analyse qui ne convainc pas Megan McArdle, sur Bloomberg. Pour elle, les modifications de la réalité ont été effectuées pour les besoins du livre, dont il ne faut pas oublier qu’il était destiné à des enfants.
«Woodside était un écrivain. Et comme tous les autres écrivains sur la planète, elle savait probablement que parfois, il faut abandonner des détails intéressants parce qu’ils vous obligent à écrire cinq paragraphes pour expliquer des choses qui, finalement, n’intéressent pas tellement vos lecteurs. Il est clair que Lane a fait beaucoup de cette sorte de travail d’édition, sur des choses qui n’ont évidemment aucune implication politique.»