Où sont les femmes cet été? Certainement pas sur les écrans de cinéma, répond le New York Mag, qui s'est attelé à un exercice de calcul sur le nombre de femmes dans les films diffusés l'été aux Etats-Unis entre 1989 et 2013.
A l'exception de Les Flingueuses, qui sort le 23 août chez nous et a amassé 40 millions de dollars au box office américain lors de son week-end de sortie, l'été n'est pas bon pour les femmes aux Etats-Unis, explique le site. La journaliste Amanda Dobbins a décidé de vérifier cette impression en comparant le nombre de femmes tenant des rôles importants les étés de 2009 à 2013 contre les cinq étés de 1989 à 1993.
Elle s'est focalisée sur les films largement diffusés, en se basant sur le nombre de cinémas où ils sortent (de 2009 à 2013, elle a pris en compte ceux sortis dans au moins 1.000 cinémas, de 1989 à 1993, une époque où il n'y avait pas encore de multiplexes, 500 cinémas). Elle a obtenu le pourcentage de films avec des femmes dans des rôles importants par rapport à la totalité des films largement diffusés dans un été donné. Les films d'animation et les films pour enfants ne sont pas inclus.
Amanda Dobbins s'est entre autres penchée sur les films comportant plus d'une femme avec un rôle principal, son idée étant que si ces films traitent les femmes comme plus que de simples décorations ou objets amoureux, et que deux femmes à l'affiche indiquent généralement un film sur un groupe de femme (comme Mes meilleures amies) plutôt qu'un film familial.
Triste résultat: de 1989 à 1993 et de 2009 à 2013, il n'y a jamais eu plus de 30% des films répondant à ces critères.
Quant aux films dont la star est une femme (y compris ceux avec une star masculine et une féminine, comme Quand Harry Rencontre Sally), ils ne représentent en 2013 là aussi que 30% de tous les films de l'été. En 2011 cette proportion est montée jusqu'à 46%, et même jusqu'à 53% en 1992. Amanda Dobbins analyse ces pics ainsi:
«Les films sur les femmes sont essentiellement une mode, commes les films sur le tir à l'arc ou l'apocalypse. Le pic de 2011 représente l'année de Mes meilleures amies et de La couleur des sentiments; celui de 1992 a lieu un an après la sortie de Thelma et Louise, comme si les studios avaient soudain réalisé que les femmes pouvaient aussi être les stars de films à succès. Et puis les studios se sont excités sur une autre mode, et les rôles principaux pour les femmes ont à nouveau disparu.»
La seule note positive de son analyse est que, vu le succès des Flingueuses, on devrait voir resurgir des films avec des femmes à l'affiche, au moins jusque la «mode» passe à nouveau...
Linda Holmes, du blog culture de la radio NPR Monkey See, s'est livrée à des calculs plus locaux: dans sa ville de Washington, 90% des 617 copies diffusées sur un jour portent sur des hommes ou des groupes d'hommes, où les femmes n'ont que des petits rôles secondaires.
Et encore, elle a accès dans la capitale à sept films avec des femmes. Dans de nombreux autres endroits des Etats-Unis, elle ne pourrait même pas en voir:
«Dans beaucoup d'endroits de ce pays, en ce moment, si vous voulez aller au cinéma voir un film sorti récemment à propos d'une femme –n'importe quelle histoire à propos de n'importe quelle femme qui ne soit pas un documentaire ou un dessin animé– vous ne pouvez pas. Vous ne pouvez pas. Il n'y en a pas un seul.»
Pour vous empêcher de déprimer, tournez-vous vers le Guardian: le journal souligne que tout un groupe d'actrices du moment écrivent aussi des scénarios de films où elles jouent, pour réussir à échapper aux rôles clichés et sans intérêt qu'on leur propose encore bien trop souvent. Elles ont encore du chemin à faire: les femmes ne représentent pour l'instant que 15% des scénaristes hollywoodiennes, rapporte le journal.
C.D.
