Culture

Arthur Alexander, l'inconnu qui a inspiré les Beatles, les Rolling Stones et Bob Dylan

Temps de lecture : 3 min

Il est probable que vous n'ayez jamais entendu parler de lui. En revanche, sa musique...

Capture d'écran de YouTube

Brow Beat, le blog sur la culture de Slate.com, retrace l’histoire des Beatles en «temps réel», 50 ans après, depuis leur premier tube à leur dernier concert en plein air. Ce mois-ci, nous nous penchons sur Please Please Me, que les Beatles ont enregistré il y a cinquante ans cette semaine. Dans cet épisode, nous partons à la découverte d’Arthur Alexander, un de ceux qui ont le plus influencé les Beatles à leur débuts, et à qui l’on doit Anna (Go to Him).

La première des six reprises qui figurent sur Please Please Me est une ballade appelée Anna (Go to Him), qui a été écrite et enregistrée pour la première fois par Arthur Alexander.

Il y a des chances pour que la plupart de ceux qui entendent la version chantée par John Lennon n’aient aucune idée de qui est Arthur Alexander, mais les Beatles savaient très bien qui il était, tout comme les Rolling Stones et Bob Dylan: Alexander est selon certains le seul auteur-compositeur à être apparu sur des albums studio de ces trois monstres sacrés. Elvis Presley a également enregistré une de ses chansons, enfin une chanson qu’il a coécrite, ainsi qu’Otis Redding, Tina Turner, Jerry Lee Lewis et Percy Sledge.

Ringo Starr a dit un jour qu’un des avantages d’être à Liverpool était que, étant dans une ville portuaire, «tous ces albums arrivaient des Etats-Unis, et on pouvait découvrir Arthur Alexander et des gens comme ça». Lennon en particulier l’a idolâtré, et McCartney a résumé son influence en 1987:

«Nous voulions sonner comme Arthur Alexander.»

En plus d’Anna, les Beatles ont fréquemment joué Soldier of Love et A Shot of Rythm & Blues, des titres d’Alexander, au cours des premières années.

Qui était donc Arthur Alexander?

Né à Sheffield en Alabama en 1940, il a enregistré son premier titre, Sally Sue Brown, à l’âge de 20 ans (Dylan a repris celui-ci en 1988 sur l’album Down in the Groove). L’année suivante, il a écrit son premier tube, You Better Move On, le premier hit des studios FAME, la légendaire usine pop de Muscle Shoals en Alabama où Redding, Aretha Franklin, Wilson Pickett et d’autres allaient enregistrer certaines de leurs meilleurs chansons.

Cette chanson a été reprise par les Rolling Stones en 1964 et apparaît sur leur album de 1965 December’s Children (and Everybody’s). Elle a ensuite donné son nom à l’album d’Alexander de 1962.

Les studios FAME ont utilisé les recettes tirées de You Better Move On pour passer eux-mêmes à autre chose et construire de meilleures installations ailleurs dans Muscle Shoals, où ils sont toujours aujourd’hui. Mais Alexander lui-même n’a jamais gagné beaucoup d’argent avec sa musique; s’il a enchaîné avec une série de singles, son prochain album a dû attendre 1972. Celui-ci, qui porte son nom, contient un autre titre qui a été transformé en tube par un roi du rock: Elvis Presley a enregistré Burning Love quelques mois seulement après la sortie de l’album, et la chanson est devenue son dernier single à atteindre le top 10, finissant à la 2e place au hit-parade.

Mais cela n’a toujours pas suffi à faire d’Alexander un homme riche. Il a complètement abandonné la musique à l'orée des années 1980 et est parti à Cleveland travailler dans un «centre pour enfants désavantagés», conduisant un bus pour gagner sa vie. On dit aussi qu’il n’aimait pas la célébrité et qu’il a trouvé Dieu.

Au début des années 1990, le producteur Ben Vaughn l’a tiré de sa retraite, et il a enregistré un dernier album, Lonely Just Like Me, sorti en 1993. Il devait partir en tournée pour faire connaître l’album, mais il est mort cette année-là d’une crise cardiaque, à l’âge de 53 ans.

Si la voix de Lennon sur Anna est superbe, personne n’a interprété les chansons d’Alexander aussi bien qu'Alexander, sa voix chaude et plaintive se mariant à la perfection avec la charmante simplicité de ses textes. «Si ça va vraiment se passer comme ça, je peux le faire, je le sais, chante-t-il sur la première chanson de Lonely Just Like Me. Je vais juste continuer jour après jour, jusqu’à ce que j’y arrive, tout seul.»

David Haglund

Traduit par Grégoire Fleurot

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