En ces temps difficiles, notre seule bouée de sauvetage psychologique est «Top Chef» (et aussi Stéphane Rotenberg à dos de chameau dans «Pékin Express», mais ceci est une autre histoire).
Dans notre premier récap, il y a quelques semaines, on avait noté que cette émission nous offrait un véritable moment d'union nationale: on ne pensait pas si bien dire.
Alors qu'on entame notre cinquième jour de confinement et que nos journées sont rythmées par les notifications Zoom et les JT anxiogènes, «Top Chef» s'est presque transformée en émission d'utilité publique et en outil de communion plus efficace qu'un discours de Macron.
Cette semaine, des tomates pourries, des enfants relous, beaucoup de foie gras et des carbonara qui n'en sont pas.
Première épreuve
On commence avec une épreuve qui semble avoir été conçue comme un boot camp spécial quarantaine.
Le challenge? Cuisiner avec de la moisissure et des produits pourris. On annonce aux candidat·es: «Vous allez devoir utiliser ces ingrédients qui normalement seraient à la poubelle.»
«Top Chef» est passé, comme nous, en mode survie. En tout cas, cette épreuve nous sera bien utile dans deux semaines, quand il ne restera plus que deux pommes moisies et une boîte de thon dans notre cuisine.
Pour démontrer la cohérence du thème, l'émission nous offre un flash-back des chefs invités depuis le début de saison, de celui qui aime cuisiner chaque partie du poulet à celui qui prépare le poisson «de la tête à la queue». Et on comprend soudain que l'agenda de cette saison, ça n'était pas l'audace, ça n'était pas les abats non plus. Non. C'était la survie en quarantaine.
Mais ce n'est pas tout! Cette épreuve sera jugée par des enfants, parce que tous les gens qui sont confinés 24h/24 avec leurs gosses et qui espéraient une petite heure d'évasion avaient vraiment besoin de ça.
Quand Gratien voit arriver la horde de petits juges, il se fait la voix d'une nation déjà à bout de nerfs:
Les enfants courent, hurlent et se déchaînent comme s'ils venaient juste de sortir de plusieurs semaines de quarantaine (décidément, cette émission est beaucoup trop prophétique).
Comme tous les ans, on sent que les producteurs leur ont demandé d'être les plus relous possible. Entre ça et les «vamos» de Diego, cette émission va être longue.
L'enfer.
Autres juges pour cette épreuve, le chef Christophe Aribert, «qui ne jette jamais rien», et le photographe Yann Arthus-Bertrand que Justine, la hype machine de «Top Chef», nous présente avec sa retenue légendaire: «Yann Arthus-Bertrand, c'est vraiment un pilier!!! De tout ce qui est écologie!!! J'espère que tout le monde le connaît!!!!!! En tout cas si on le connaît pas, faut le connaître!!!!!!» C'est noté.
Dans la brigade d'Etchebest, Gratien et Diego sont en équipe et préparent des tagliatelles de salsifis façon carbonara. Des salsifis pour convaincre un jury d'enfants? Quelle bonne idée! Quand on a réclamé une épreuve carbo, c'est pas à ça qu'on pensait, hein.
Diego saisit cette opportunité pour nous servir la blague de la soirée:
Ne souffrons-nous déjà pas assez?
Petite minute écolo avec Diego, qui profite du thème pour nous expliquer que les cuisiniers sont «les premiers remparts de l'écologie» et qui assure que son équipe va «sauver la planète», le tout en détruisant une carcasse de poulet à grands coups de couteau.
Il nous dit ensuite qu'il y a «dix millions de tonnes de déchets chaque année, c'est un truc de fou, c'est trop», tout en découennant du lard. On sent que Diego n'a pas encore complètement été briefé sur l'empreinte carbone de l'industrie de la viande et sur la partie «cause animale» du discours écolo.
En même temps, rien de mieux qu'un plan comme ça pour nous convertir au végétarisme.
Dans la brigade de Paul Pairet, Justine et Mory font équipe car selon le chef, «sur le thème de l'environnement», les deux candidats «peuvent bien s'entendre». On sait pas trop ce que ça veut dire, mais ok!
Pairet fait ensuite l'éloge de Mory et de son génie créatif, puis nous dit que comme Justine gère son propre restaurant, elle doit s'y connaître en anti-gaspillage. On sent qu'il estime grave sa candidate. Ça fait plaisir.
Justine et Mory préparent des raviolis de légumes passés et de fromage. Dans cette épreuve, les légumes sont «fatigués», «ramollis» et «moches» –comme nous au cinquième jour de confinement. Mais les raviolis ont l'air magnifiques et nous font regretter de ne pas avoir investi dans une machine à pâtes avant la quarantaine.
Les enfants viennent rendre visite aux candidat·es pour les faire chier voir comment leurs plats avancent. Et là, énorme plot twist: Justine, qu'on a souvent imaginée en conteuse pour enfants, ne sait pas du tout comment leur parler et leur montre des têtes de crevettes pour leur expliquer que le plat va être bon.
Décidément, plus les épisodes passent et plus Justine se révèle être une héroïne complexe et fascinante. On l'aime.
Le plus doué avec les enfants, ça reste Adrien, qui est dans l'évitement total. Il leur prépare du pain perdu avec un guacamole sucré d'avocats noircis et des chips de feuilles d'épinards saupoudrées de sucre glace. Le sucre glace, nous soutient-il, c'est pour «apporter un côté féerique» à son plat. Adrien, tu sens que tu pourrais le mettre en confinement, ça ne poserait pas de problème, parce qu'il voyage très, très loin dans sa tête.
Vous aussi vous la sentez, la féerie?
Seul problème, l'avocat et les épinards ne sont pas les ingrédients les plus populaires chez les moins de 10 ans. Sa solution: mentir aux enfants au sujet de ce qu'il y a dans leur assiette (une méthode testée et approuvée par de nombreux parents au bord du gouffre).
On n'est pas sûres que ça marche.
Lorsque les enfants viennent pour lui poser des questions, il leur demande de ranger des trucs au frigo pour se débarrasser d'eux. Quel homme.
Quant à Davou et Mallou, toujours en équipe, ils tentent un nouveau look cette semaine.
Nous quand on s'emmerde en quarantaine.
On ne sait pas si ça fonctionne, mais en même temps, on va pas vous dire que ça ne fonctionne pas. Les temps sont durs. Ça fait plus de cinq jours qu'on n'a pas vu un autre être humain en chair et en os. On est donc très fragiles, et quand les deux candidats racontent qu'ils se sont «transformés en ninjas» et commencent à préparer de magnifiques gyozas, on a juste envie de profiter de notre isolement pour écrire des fanfictions absurdes et érotiques sur eux (quand on vous dit qu'on va très mal).
Passons à Martin, le mec le plus technique du concours, qui décide de faire… une tomate farcie. Incroyable. C'est vraiment la saison de l'audace.
Elles sont pas mal, mais celles de nos grands-mères étaient plus belles.
On finit avec la brigade de Michel, où il ne reste plus que Pauline et Nastasia. L'occasion pour l'émission de revenir sur le fritegate, le moment le plus traumatisant de cette saison, avec un flash-back encore plus gênant que les sous-titres pendant les allocutions de Macron.
Parmi tous les ingrédients pourris de l'épreuve, les deux candidates ont choisi les plus pourris: du vieux bœuf trop cuit et du céleri. Franchement, sans même parler des enfants, nous à 30 ans, on n'aurait pas envie de manger ça.
Quand ton équipe, c'est vraiment la plus nulle de l'histoire des équipes.
Comme si ça ne suffisait pas, Pauline décide de découper son vieux bœuf en lamelles, «pour les présenter comme une grosse frite». PAULINE, ON A DÉJÀ DISCUTÉ DE ÇA. UNE FRITE, C'EST DE LA POMME DE TERRE. JE SAIS QUAND MÊME CE QUE C'EST QU'UNE FRITE. Cette équipe ne fait décidément rien correctement.
Ceci n'est pas une frite.
Après toutes ces émotions, la dégustation commence. Tout de suite, une star sort du lot: Jules, un petit à lunettes, beaucoup trop éloquent pour son âge. On sent que ses parents écoutent France Culture et regardent Arte.
On aimerait qu'il vienne juger nos vies.
Comme prévu, le dessert aux épinards d'Adrien ne passe ni avec les enfants, ni avec le chef. Et l'assiette de Nastasia et Pauline peine aussi à convaincre. En même temps, voir ces boulettes toutes sèches sans aucune sauce, ça nous heurte profondément.
Ces petites crottes, ça donne vraiment pas envie.
Ce sont finalement Davou et Mallou qui gagnent la première épreuve. La carbo de Diego et Gratien, qui avait pourtant l'air délicieuse, n'a même pas droit à une deuxième place. C'est bien triste.
Deuxième épreuve
Arrive ensuite l'heure de la deuxième épreuve, et c'est un soulagement. Après les entrailles, les chips de peau, les cous de poulet, les moisissures, l'émission nous offre enfin un thème qui nous fait saliver: le foie gras. Meilleure épreuve. On s'est entraînées toute notre vie pour ça.
Le chef invité, c'est Mathieu Viannay, qui officie à La Mère Brazier, grande institution lyonnaise.
Quand Justine le voit arriver, on dirait nous devant un nouvel approvisionnement de rouleaux de papier toilette.
Quand ça fait trois semaines que tu rationnes le PQ.
Le défi pour les candidat·es restant·es sera de créer une nouvelle interprétation de l'artichaut-foie gras, un grand classique qu'en bonnes Sudistes, on ne connaît pas particulièrement bien (chez nous, le foie gras, c'est plutôt avec du pain d'épices, de la confiture de figues ou juste du pain).
Le chef Viannay présente les diverses versions sur lesquelles il a lui-même déjà travaillé, dont un gâteau de foie gras tellement décadent qu'on a tout de suite imprimé une attestation dérogatoire pour pouvoir aller s'en acheter. Si ça, c'est pas une nécessité vitale, on ne sait pas ce que c'est.
Meilleur gâteau d'anniversaire de l'histoire.
Mais la version qui a complètement eu raison de nous, c'est la numéro 11: un foie gras poêlé avec de l'artichaut farci à la ventrèche gnnnamalfjczbehzeefzhdjhuzfhrao (ceci est le bruit de notre clavier ayant un orgasme).
Tout de suite, on voit que Martin et Gratien sont (encore une fois) au-dessus du lot, avec une recette de foie gras poché au bouillon de crevettes grises et d'artichaut farci à la mousse de foie gras. Ça a l'air à la fois ouf et… faisable??? Franchement, avec tout le temps disponible que vous avez, c'est le moment d'expérimenter chez vous. Par ailleurs, l'astuce de Martin et son couteau-scie pour couper les artichauts, c'est un game changer.
Diego, qui nous impressionne de plus en plus chaque semaine, décide d'agrémenter son foie gras d'une gelée grenade-harissa. C'est comme s'il avait puisé son inspiration dans nos rêves.
Il est épuisant. Mais on l'aime bien quand même.
Pauline et Nastasia, quant à elles, semblent plutôt bien parties avec une idée de rosace de foie gras. Michel, qui mériterait vraiment un peu de répit, a l'air super content! Espérons que le mauvais sort soit enfin rompu.
Quand t'espères que tu vas enfin arrêter de perdre.
Seulement, plus leur recette avance, plus Nastasia et Pauline font face à des difficultés. Incapables de couper leur foie gras à la mandoline, elles doivent faire des tranches plus épaisses, au couteau, ce qui est nettement moins chic. Le résultat final est moche comme un salsifi fatigué. C'est officiel: cette équipe est vraiment maudite.
Justine, qui avait déjà gagné notre cœur avec son enthousiasme et son optimisme, nous propose quant à elle des «petits croûtons imbibés de foie gras, dorés, comme un pain perdu». Mamma mia. On veut ça au petit dej' pour le reste de nos jours.
Paul Pairet n'a malheureusement pas l'air aussi convaincu que nous, et il lui sort même un «j'espère que tu y crois plus que moi» super encourageant. Depuis que Justine a rejoint sa brigade par défaut, on a l'impression qu'il ne lui fait pas entièrement confiance et la considère un peu comme la troisième roue du carrosse. On aimerait tellement qu'elle remporte cette épreuve face aux mecs de sa brigade, pour leur montrer ce qu'elle vaut.
Paul Pairet goûte une partie de son plat et lui dit, sans grand enthousiasme, «ça, c'est plutôt intéressant». Justine, éternelle optimiste, choisit l'interprétation la plus généreuse:
Nous, on est du genre à entendre un compliment et à le prendre comme une insulte; Justine, c'est l'inverse.
Ce moment de la saison commence à être vraiment compliqué, parce qu'on veut que Justine gagne, mais on veut aussi que Martin et Gratien gagnent et que la brigade de Michel gagne (surtout pour Michel). Quoi qu'il arrive à la fin de l'émission, on sent déjà qu'on va avoir le cœur brisé.
De leur côté, Adrien et Mory décident de créer une recette de «foie gras en brioche», ce qui occasionne notre douzième orgasme depuis le début de l'épreuve.
La dégustation commence, et c'est peut-être la première épreuve de la saison où tout a l'air trop bon –ou alors c'est juste parce qu'on n'en peut plus de manger des pâtes au PQ depuis trois jours.
Martin et Gratien remportent l'épreuve et confirment leur statut de candidats à abattre cette saison. En plus, leur bromance est toujours aussi divertissante.
Franchement, c'est la première année avec autant de candidat·es à qui on a envie de faire des câlins. Mais c'est peut être la solitude de la quarantaine qui nous fait dire ça.
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Dernière chance
Pour la dernière épreuve de la soirée, le thème est simple –et parfait en cette période de placards déprimés: le produit à sublimer sera l'œuf. Les candidat·es sur la sellette sont Mory, Pauline et Diego. Honnêtement, on n'a envie d'en voir partir aucun.
Mory commence très fort et propose des pâtes carbonara où les tagliatelles sont en réalité juste du blanc d'œuf. Si votre rayon pâtes a vous aussi été dévalisé, vous savez ce qu'il vous reste à faire, même si ça ressemble un peu au genre de plats très peu caloriques que mangerait Gwyneth Paltrow.
Pauline, elle, a entendu «œufs» et a retenu que les œufs, c'était jaune, alors elle cuisine que des aliments jaunes: du haddock, du maïs et même des fleurs jaunes. Ah oui, et des œufs de caille.
Alors qu'elle est en train de mixer son velouté de maïs, le blender maléfique de «Top Chef» se réveille:
Ceci dit, on aurait dû s'y attendre, une saison de «Top Chef» sans blender qui foire, ça n'existe pas.
Diego, lui, est de retour aux platines.
Quel homme!
Et il a trouvé les trois mots qui peuvent nous faire jouir sans contact: «œuf mollet frit». On achète, même si lui non plus n'a pas l'air d'avoir bien compris le principe de l'épreuve: «Je vais faire une purée de butternut, des chips de butternut et un jus de butternut.» Et de conclure: «L'élément principal, c'est l'œuf.» ???
Les choses se compliquent quand il commence à écailler ses œufs à peine cuits et en détruit la moitié. Plus il les massacre, plus notre tachycardie augmente. «Faut y aller mollo mollo», dit-il en maltraitant son œuf à toute vitesse. DIEGO, À CE RYTHME-LÀ, TU VAS JAMAIS TENIR PENDANT LA QUARANTAINE.
Lors de la dégustation finale, les pâtes carbo au blanc d'œuf de Mory semblent séduire le jury, qui émet plus de réserves sur les plats de Diego et Pauline. Michel est au bord de la syncope quand il réalise que Pauline risque de partir.
Comme d'hab', on nous met une petite coupure pub juste avant d'annoncer qui est éliminé·e, parce qu'on trouvait déjà pas assez le temps long cette semaine. C'est pas très citoyen ça, M6!
Juste après la pub, Hélène Darroze déclare que l'assiette qui reste est «le simple œuf mollet», et alors que Diego traîne à lever la main, même Philippe Etchebest ne tolère plus le suspense.
C'est donc finalement Pauline qui est éliminée. Pauvre Michel. Nastasia est son dernier espoir. Mais c'est de ce genre d'épreuve qu'on se relève encore plus grand.
En vrac
– «Une saison unique, comme jamais vous n'avez vue»: on te le fait pas dire, Michel!
– Etchebest qui dit: «Le foie gras, ça parle à qui? Ça parle à qui? Ça parle à moi!»
Trois chefs sur quatre viennent du Sud-Ouest, donc ça parle à tout le monde, hein. En fait, son nouveau truc à chaque épreuve, c'est de crier le nom des aliments pour intimider ses adversaires.
– «Ça passe ou ça casse, et je compte bien tout faire pour que ça passe», «Si j'arrive pas à sortir mes œufs, y a pas de recette», «Si ça foire, je suis foiré». Diego continue de prendre des risques dans sa narration.
– «Vous êtes chauds aujourd'hui ou pas???»: on commence vraiment à suspecter que Diego est DJ à ses heures perdues. On prie secrètement pour qu'il fasse un set sur le balcon d'en face pendant le confinement.
– «Cette carbonara de la dèche, elle est cool, elle est bonne». Diego, c'est nous pratiquant la méthode Coué après cinq jours en quarantaine.
– «Dans une carbonara, il faut quand même des oignons»: Mory, l'Italie va déjà très mal en ce moment, il faut faire attention à la portée de propos aussi blessants et irresponsables.
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– Gratien qui fait un bisou à Diego, ON FOND!!!!!! Encore un truc qu'on n'a plus le droit de faire, bordel.
– «Ne mets pas de la cervelle de veau, c'est pas le moment»: une phrase qu'on ne peut entendre que dans «Top Chef».
– Diego, faudrait pas bâtir une tente avec lui, tu sens le mec nerveux qui s'enflamme dès qu'il y a un truc qui va pas.
– Quand tu te rends compte que t'as déjà bouffé tous tes snacks de quarantaine:
Bon désolées, ce récap de «Top Chef» s'est un peu transformé en récap confinement. Bon courage à tout le monde, et n'oubliez pas d'écouter les sages paroles de Philippe Etchebest.