Chaque année en France, environ 10.000 couples —impérativement mariés— reçoivent un agrément à l'adoption. Mais ce n'est que la première étape, car ensuite vient l'attente, souvent longue, jusqu'au moment où leur enfant leur sera confié. C'est grâce à la loi de 2013 que Philippe et Mathieu parviennent enfin à entrevoir un futur où ils pourraient être parents. «Même à 20 ans, je savais que j'aurais des enfants. Bien sûr que la question de l'homosexualité se pose sur comment avoir des enfants, et pourquoi en tant qu'homosexuel, je serais privé d'avoir des enfants», témoigne Matthieu. Dans Post-Scriptum, le couple raconte son parcours d'adoption, qui se conclut avec l'arrivée de leur petite fille tant attendue.
Mais une famille unie n'empêche pas les questionnements des enfants adoptés sur leurs origines, notamment lorsqu'ils se retrouvent face à un miroir. Marine raconte dans Transfert ce manque au plus profond d'elle, qui va l'engager dans une quête pour retrouver sa génitrice. «Je me pose la question de ma ressemblance physique. Je cherche un visage. [...] Dès que je vois des femmes un peu typées latines ou un peu brésiliennes, je fantasme sur ces visages en me disant que ça pourrait peut-être être ma mère biologique.»
Ce manque, ce visage à trouver, Émilie aussi le connaît. Au micro de Transfert également, elle retrace l'histoire de son adoption. Ses parents ne disposent que de très peu d'informations, et ils semblent s'en contenter. Mais Émilie veut connaître son passé à tout prix, quitte à bouleverser ses certitudes. «J'ouvre Google et je commence à taper juste quelques mots. Et là, c'est la boîte de Pandore qui s'ouvre. Il y a ces mots qui surgissent: stratagèmes, enfants volés, dates falsifiées.» C'est alors le début d'une recherche pour Émilie, car elle n'a pas seulement été adoptée, elle a sûrement été enlevée à sa famille d'origine.
Malheureusement, ce n'est pas un cas isolé et les actions en justice se multiplient. Dans La Veillée, Carmen témoigne de son expérience personnelle avec l'association Hacer Puente. Cette Française d'origine guatémaltèque a grandi avec l'idée que sa mère était une héroïne qui l'avait abandonnée pendant la guerre civile. En partant à sa recherche, elle découvre que la réalité est tout autre. «Mes parents adoptifs n'en avaient absolument aucune conscience et moi, je reviens avec cette odieuse vérité en disant: “Bah voilà, vous m'avez acheté les gars, qu'est-ce qu'on fait?”» Désespérés face au délai d'attente pour adopter –en moyenne quatre ans–, de nombreux couples se tournent vers des associations spécialisées dans l'adoption internationale. Certaines ont malheureusement fait l'objet de poursuites pour trafic d'enfants. L'adoption, que ce soit pour les parents ou les enfants, reste un saut dans le vide.