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Huile de palme: les enfants, premières victimes

Loin d’être au cœur des préoccupations, les plus jeunes –et surtout ceux qui souffrent de surpoids ou d’obésité– pâtissent de ces pseudo-débats nutritionnels.

<a href="http://www.flickr.com/photos/sandrinnedias/5792443226/">Nutella lips</a> / Sandrinne Dias via FlickrCC <a href="http://creativecommons.org/licenses/by-sa/2.0/deed.fr">Licence by</a>
Nutella lips / Sandrinne Dias via FlickrCC Licence by

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Depuis plusieurs semaines déjà, les débats autour du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi de finance pour 2013 voient s’opposer parlementaires et industriels de l’agroalimentaire sur une matière grasse largement utilisée dans les produits «tout faits»: l’huile de palme. Les premiers veulent la taxer davantage. Les seconds s’y opposent. Classique.

C’est a priori une bonne nouvelle.

Dans leurs arguments, les parlementaires soulignent en effet, au-delà des impacts environnementaux, que l’huile de palme –riche en acides gras saturés, classés dans la catégorie «mauvais pour la santé»– est utilisée «dans les produits de biscuiterie et dans l’alimentation salée ou sucrée à destination des enfants».

L’industriel leader sur le segment des pâtes à tartiner a quant à lui publié une lettre ouverte, dans laquelle il démontre, tableau comparatif des sucres (glucides) et graisses (lipides) à l’appui, que ces mêmes enfants peuvent incorporer son produit phare dans leur goûter sans que ce dernier n’en devienne pour autant plus «mauvais» au niveau nutritionnel.

Dans les deux cas, l’objectif semble identique: protéger la santé des enfants...

Sauf que la consommation actuelle d’huile de palme –une graisse par ailleurs moins riche en acides gras saturés que le beurre– n’a aucun impact sur la santé des plus jeunes. Tous les nutritionnistes s’accordent sur ce point. Le fait que l’acide palmitique, son principal constituant, soit présent en quantité importante dans le lait de mère le confirme. Sauf qu’il suffit de modifier les quantités de pâte à tartiner dans le tableau de l’industriel concerné ou d’y insérer d’autres goûters (sans chocolat) pour qu’immédiatement les comparaisons soient moins flatteuses, et que dans tous les cas l’équilibre nutritionnel ne s’évalue pas sur un repas, mais sur plusieurs.

Sauf qu’au final tous ces arguments nutritionnels ne sont que des prétextes, utilisés dans un cas pour renflouer (un peu) les caisses de l’Etat et dans l’autre pour vendre encore plus de pâte à tartiner. Aucun d’eux ne fait progresser la connaissance du public –et des parents– sur la question. Aucun d’eux n’épargne les enfants.

Loin d’être au cœur des préoccupations, les plus jeunes –et surtout ceux qui souffrent de surpoids ou d’obésité– sont en effet les victimes de ces pseudo-débats nutritionnels. Ils étaient déjà stigmatisés par leurs camarades et la société en général. Ils risquent en plus de se sentir coupables s’ils osent choisir un goûter avec de la pâte à tartiner.

Alors taxer les huiles plus ou moins saturées, tous les aliments et même tous les produits de consommation imaginables au nom du nécessaire rétablissement des finances publiques ou de la protection de la planète, cela se discute peut-être. Affirmer que telle ou telle pâte à tartiner est celle dont le goût est le plus raffiné et la qualité inégalable, pourquoi pas. Mais invoquer la santé des enfants... il devrait y avoir une loi contre de tels égarements.

Patrick Tounian

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