Politique / France

De 1973 à 2015, quarante ans d'évolution des scores du FN en un graphique

Lors du premier tour des départementales, le parti a battu son score record en termes de suffrages exprimés, mais pas en pourcentage des inscrits ni en voix.

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Un record en termes de suffrages exprimés, mais pas en termes d'inscrits ni de voix: le FN a réalisé lors du premier tour des élections départementales, dimanche 22 mars, une performance substantielle en dépassant pour la première fois le quart des suffrages exprimés (25,24%).

Comment la restituer dans l'histoire du parti frontiste? Le graphique ci-dessus montre les scores du parti en pourcentage des exprimés et des inscrits, depuis sa création et sa première entrée dans l'arène électorale (0,44% des voix aux législatives 1973).

En exprimés, le FN réalise donc le meilleur score de son histoire, en hausse d'environ 0,4 point par rapport à son score historique des européennes (24,85%). Encore faut-il noter que, contrairement à ce dernier scrutin, tous les électeurs n'avaient pas à disposition un bulletin de vote FN: le parti était présent dans 93% des cantons et affirmait couvrir 98% de la population de la France métropolitaine; Outre-mer, ses candidats ne «couvraient» qu'un gros quart de la population concernée.

Vu la pénétration électorale de plus en plus importante du Front national, on peut estimer à 200.000 à 300.000 les voix perdues dans l'affaire, l'équivalent de 1 à 1,5 point. Mais à l'inverse, comme le soulignait Libération avant le scrutin, le fait que Paris, Lyon, la Guyane et la Martinique ne votaient pas dimanche a probablement mécaniquement relevé le score du FN –aux dernières européennes, cela lui aurait donné 0,7 point en plus.

Ce score du FN peut aussi être apprécié, sur le graphique ci-dessous, au regard du nombre de candidats. Le parti a réalisé ses premières percées lors de scrutins qui en nécessitaient peu: un seul pour la présidentielle, quelques dizaines pour les européennes, quelques centaines pour les législatives. Aux cantonales, le record du parti était jusqu'ici de 15% en 2011, avec «seulement» 1.440 candidats; ses plus de 3.800 candidats ont réalisé dix points de plus en moyenne dimanche soir. Notons par ailleurs que le manque d'implantation locale rendait auparavant certain résultats peu interprétables: en 1995, le FN avait remporté trois grandes villes (Orange, Marignane, Toulon) pour seulement 3,9% des voix au plan national...

En pourcentage des inscrits, le FN est resté en revanche dimanche en dessous de son record, les 13,95% de Marine Le Pen lors de la présidentielle 2012. Il lui aurait fallu, pour cela, dépasser les 27,8% des voix. Il se contentera donc d'un peu plus de 12% des inscrits, juste au-dessus de ce que faisait Jean-Marie Le Pen lors des présidentielles 1988, 1995 et 2002 (autour de 11,5% les trois fois).


 

 

Enfin, en termes de voix, il fait mieux que retrouver son niveau des européennes, avec près de 5,2 millions de voix contre 4,7 millions, même si ce total reste loin des 6,4 millions de voix de Marine Le Pen en 2012. Le graphique ci-dessous montre clairement les différents paliers électoraux du FN:

  • une explosion à 2 millions de voix aux européennes de 1984, consolidée lors des deux années qui suivent;
  • une nouvelle percée lors de la présidentielle de 1988, à plus de 4 millions, qui vont rester l'étiage maximal du parti jusqu'à la prise de pouvoir interne de Marine Le Pen, avec régulièrement des scores de plus de 3 millions, et des creux importants, notamment lors de la scission mégrétiste après 1999;
  • une nouvelle percée à partir de 2012, avec deux scores supérieurs à 5 millions de voix, à la présidentielle 2012 et, donc, aux départementales 2015.

(Pour la rigueur de la comparaison en voix, rappelons également que le nombre d'électeurs français a augmenté d'environ 50% entre 1973 et aujourd'hui, et que jusqu'à 2011 les cantonales ne concernaient qu'une moitié de l'électorat.)

Selon le spécialiste du FN Jean-Yves Camus, qui intervenait lundi matin à la fondation Jean-Jaurès, on a assisté au final à «un scrutin de confirmation, pas un scrutin de bouleversement», avec «un très bon score du FN en valeur absolue par rapport à son histoire». Le chercheur a notamment pointé les très bons scores du FN dans certaines anciennes «terres de mission», comme la Creuse, où il atteint près de 18% des voix.

Le chercheur Joël Gombin a lui pointé un rééquilibrage territorial du vote frontiste, qui connaît une stabilisation, voire un tassement, dans les territoires les plus périphériques et les plus populaires.

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