Sciences

Les négationnistes du changement climatique commencent à avoir très chaud

Contrairement aux températures, leur crédibilité est en chute libre.

Harlequin Lake, en Alaska, le 7 octobre 2014. REUTERS/Bob Strong
Harlequin Lake, en Alaska, le 7 octobre 2014. REUTERS/Bob Strong

Temps de lecture: 3 minutes

Si vous aviez le secret espoir de nier la réalité du changement climatique, sachez que la météo ne vous est pas trop favorable. A la faveur de quelques événements récents, le tonnerre n'en finit pas de gronder pour les climatosceptiques les plus véhéments. Et c'est bien fait.

Un climatosceptique financé par le pétrole

Le premier gros nuage est celui qui plane au-dessus du physicien Wei-Hock «Willie» Soon, que l'on sait désormais cul et chemise avec le lobby pétrolier. S'il n'est pas un climatologue, Soon a publié plusieurs articles liant variations solaires et températures terrestres, et avançant l'argument général selon lequel le soleil serait le responsable du réchauffement climatique, pas le dioxyde de carbone généré par l'activité humaine.

La solidité scientifique de son argumentation est remise en question par des climatologues au moins depuis 2003, et a par ailleurs été réfutée sur le site Skeptical Science. Contrairement à ce que Soon en dit, le débit solaire a légèrement diminué ces dernières années, tandis que les températures terrestres ont continué à augmenter.

Grâce au FOIA, Greenpeace a pu obtenir des documents prouvant que Soon avait reçu plus d'un million de dollars en subventions de la part du secteur pétrolier. En soi, se faire financer ses recherches n'a rien de scandaleux, exception faite de deux petits détails. Le premier, c'est que Soon a oublié de mentionner la source de ses financements dans près d'une douzaine de ses articles, soit un gros gros interdit en science. Si vous risquez le conflit d'intérêts, il faut le déclarer. 

L'autre, c'est qu'en ajoutant l'origine de ses financements et les critiques scientifiques portées à son travail, son refrain sur la pollution humaine au CO2 qui ne serait pas à l'origine du réchauffement climatique en devient franchement suspect. Et quand on sait que ses subventions proviennent d'Exxon, de l'American Petroleum Institute et des frères Koch, on dit beurk.

Un consensus existe

Ce que je trouve rigolo, c'est que des groupes comme l'Institut Heartland –ceux qui comparaient certains climatologues à des dictateurs et des tueurs en série– défendent Soon, lorsqu'ils hurlaient à la mort pendant le faux scandale du «Climategate». Pour ce genre de négationnistes, le but est de semer le doute, coûte que coûte.

Mais voilà où nous en sommes aujourd'hui. Sur le réchauffement climatique, le consensus scientifique existe et il est tout à fait clair et solide. Si votre positionnement politique repose sur du non-sens, et que vous êtes démasqué, votre ultime recours consistera à doubler la mise, faire beaucoup de bruit pour rien ou multiplier les petites combines atrocement gênantes. A l'évidence, vous ne pourrez pas appeler la réalité à la rescousse, vu que ça fait longtemps que vous l'avez laissée sur le carreau.

La prochaine sortie aux Etats-Unis du film Merchants of Doubt promet d'enfoncer le clou. Ce documentaire, issu du livre de Naomi Oreskes, met en lumière toutes les entourloupes des négationnistes climatiques ces dernières années. Espérons qu'il permettra au plus grand nombre d'y voir plus clair sur ces sombres personnages et leurs vilaines tactiques.

Ce qui nous amène à une autre actualité qui donne des sueurs froides aux négationnistes. Récemment, j'ai parlé de l'initiative de Google consistant, en ce qui concerne les maladies que la vaccination permet d'éviter, à mettre en avant des sources vérifiées afin d'entraver l'implacable propagation de la désinformation.

Google va-t-il moins bien les référencer?

Aujourd'hui, il semblerait que Google s’apprête à appliquer cette méthode de validation scientifique à d'autres domaines, et notamment au changement climatique. A l'heure actuelle, le classement des résultats sur Google répond à plusieurs méthodes, corrélées notamment au nombre et à l'«autorité» des sites qui se lient entre eux. Mais cette méthode est facile à flouer, vu que des sites de pseudo-science ou même d'anti-science sont classés très haut dans les résultats du moteur de recherche.

Des chercheurs de Google viennent de publier un article qui propose l'utilisation d'un «fond de connaissances», où les faits mentionnés sur un site seront comparés avec les connaissances communes d'un ensemble de sources vérifiées. Comme le résume le New Scientist, «des faits sur lesquels l'Internet est unanimement d'accord seront considérés comme assez proches de la vérité». Par exemple, vous pouvez faire un site affirmant que la Terre est plate, et y mettre plein de liens vers des sites populaires qui seront de votre avis, mais avec ce nouveau système, Google ne les aimera pas beaucoup. Comme de juste.

Ce qui panique les négationnistes climatiques. Comme de juste. Vu qu'ils se fondent sur des affirmations ridicules, et bien souvent solidement réfutées, il est logique de les voir baisser dans les résultats Google.

Reste que cette nouvelle méthodologie est quand même préoccupante, tant elle se fonde, globalement, sur l'idée voulant que, si une majorité d'autorités sur un sujet est d'accord, alors ceux qui ne le sont pas doivent être réduits au silence. Dans l'article, les chercheurs débattent de diverses manières d'amender l'algorithme. Mais, en théorie, il sera toujours possible de flouer le système. 

Mais je ne peux pas m'empêcher de sourire, d'une manière un peu sadique. Google veut fonder ses résultats de recherche sur un consensus scientifique d'experts? Parfait, que cela suscite aux négationnistes climatiques un frisson d'angoisse existentielle.

Autrement dit, ils n'ont pas fini d'avoir vraiment chaud aux fesses.

cover
-
/
cover

Liste de lecture