Économie

Trois surprises d'un pétrole bon marché

Les effets indirects et surprenants commencent à poindre...

REUTERS/Edgar Su
REUTERS/Edgar Su

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La chute inespérée et subite du prix du pétrole, qui a baissé de plus 50% depuis cet été, a secoué le monde. Certains de ses impacts ont été immédiats et visibles, d’autres non.

Les pays dont l’économie dépend des exportations de pétrole pour se maintenir à flot imposent à leur population de rigoureuses restrictions budgétaires, la dévaluation de leur monnaie et, de manière générale, une situation économique difficile. Le Venezuela, l’Iran, le Nigeria et la Russie sont les principales victimes de ce phénomène. Dans l’ensemble, les recettes annuelles des pays exportateurs d’énergie ont baissé de 2.000 milliards de dollars.

En revanche, les consommateurs de pétrole en ont bien profité: pour chaque employé(e) américain(e), par exemple, la chute des prix des produits pétroliers équivaut à une augmentation salariale de 4,5%. Le taux moyen d’inflation mondiale a aussi diminué, l’agriculture en a bénéficié et un certain nombre de pays ont vu leur économie stimulée par la baisse du prix de l’énergie.

Quant aux conséquences indirectes et surprenantes de la modicité du prix du pétrole, elles commencent à présent à poindre. Ces nombreux effets apparaissent de plus en plus nettement, et trois d’entre eux méritent d’être soulignés: d’abord, une incitation à éliminer ou à réduire les subventions, qui sont très injustes; ensuite, un impact sur les marchés financiers mondiaux et, enfin, une pression sur les producteurs d’énergies renouvelables (solaire, éolienne, etc.) pour qu’ils baissent leurs tarifs et puissent ainsi concurrencer plus efficacement le charbon, le gaz et le pétrole.

1.Subventions

De nombreux gouvernements maintiennent les prix des carburants, des combustibles ainsi que de l’électricité à un niveau artificiellement bas et compensent les pertes des producteurs par des aides publiques. Cela coûte 540 milliards de dollars par an. Des études de la Banque mondiale montrent qu’une telle politique exacerbe les inégalités, puisque ces dépenses avantagent les plus riches.

Au Proche-Orient, par exemple, entre 60% et 80% de ces subventions profitent aux couches les plus aisées de la population, soit une personne sur cinq. Alors que les plus pauvres n’en reçoivent que 10%.

L’idéal est de supprimer ces subventions générales injustes et de les remplacer par des aides ciblées accordées aux ménages ayant les revenus les plus faibles. Mais les gouvernements craignent la réaction des classes moyennes et supérieures face à l’augmentation de ce qu’elles paient pour l’essence ou l’électricité.

Cependant, grâce à la chute des prix, ils osent maintenant agir. De l’Inde au Maroc et de la Malaisie au Koweït, de plus en plus de gouvernements réduisent les subventions à l’énergie: la chute des prix mondiaux du pétrole amortit à présent l’impact de cette mesure.

2.Marché financier mondial

Quand le pétrole coûte cher, les pays exportateurs accumulent d’énormes quantités d’argent. Beaucoup d’entre eux ont créé des fonds souverains pour investir ces excédents financiers sur le marché mondial moyennant l’achat d’actions et d’obligations.

Par exemple, le fonds souverain norvégien totalise 893 milliards de dollars d’actifs et détient 1,3% de toutes les actions et obligations du marché mondial. Le reste des fonds de ce type a accumulé des actifs évalués à 7.000 milliards de dollars.

Quand les revenus pétroliers s’effondrent, un certain nombre de ces pays se voient obligés d’utiliser ces fonds pour compenser la différence entre les recettes et les dépenses publiques. Ils doivent donc se mettre à vendre d’énormes quantités d’actions, d’obligations et d’autres valeurs. Cela entraîne d’importants changements concernant la propriété de nombreuses grandes entreprises, qui mettent désormais en vente une partie de leur capital. Nous verrons beaucoup de surprises dans ce domaine.

3.Soleil et vent

Jusqu’ici, les énergies renouvelables, moins polluantes, pouvaient difficilement rivaliser avec le charbon et les hydrocarbures, car il revenait plus cher de produire de l’énergie à partir du vent et du soleil qu’en brûlant du charbon ou du pétrole. Et naturellement, c’est mauvais pour l’environnement.

Mais récemment, le coût de production des énergies renouvelables a baissé, bien qu’elles continuent d’être plus chères. La chute du prix du pétrole fera que, pour survivre, les producteurs d’énergie solaire ou éolienne seront contraints de réduire davantage leurs prix. Ainsi, lorsque les cours du brut remonteront –tôt ou tard–, les prix des énergies renouvelables seront descendus à un niveau qui leur permettra de concurrencer plus que jamais le charbon et le pétrole. Excellente nouvelle.

Tous ces effets dépendent bien sûr de la durée de la période pendant laquelle les cours du pétrole resteront relativement bas. Selon Rex Tillerson, le patron d’ExxonMobil, cela durera «un certain temps».

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