Économie / France

Bernard Maris était le respect, l’érudition et la gentillesse

Agé de 68 ans, «l'oncle Bernard» de Charlie Hebdo défendait avec science, mais aussi avec originalité et loufoquerie, les thèses économiques de gauche dans le débat public.

Bernard Maris ©JF Paga – Grasset, 2013
Bernard Maris ©JF Paga – Grasset, 2013

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Il était cultivé, il était doux, il était curieux, il était démocrate. Bernard Maris, 68 ans, fait partie de la liste des victimes de l'attentat commis contre Charlie Hebdo, ce mercredi 7 janvier. Il écrivait, sous la signature d’«Oncle Bernard», des billets pour raconter l’économie, pour l’expliquer dans des journaux, dont Charlie, qu’il contribua à relancer en 1992. Sa qualité de pédagogue hors pair lui avait valu d’occuper de bons emplacements dans une presse où cette discipline de chiffres ne provoque en général pas un enthousiasme gigantesque.

Docteur de l’université de Toulouse, il connaissait la matière. Il écrivait franchement «à gauche», devenant conseiller scientifique d’Attac, puis s’engageant même dans la politique en se présentant en 2002 aux législatives, dans le Xe arrondissement de Paris, sous l'étiquette des Verts. Pour confirmer ses parchemins, il avait tenu à passer le concours de l'agrégation en 1994: le voilà professeur de plein titre, armé de légitimité pour contrer les thèses libérales. Il avait obtenu une consécration en étant désigné au Conseil général de la Banque de France en 2011.

Bernard Maris était invité pour défendre les thèses «de gauche» dans les débats télévisuels. Il le faisait toujours avec soin, avec sa science, mais aussi avec ses emportements, son originalité et toujours avec drôlerie, voire loufoquerie.

L’oncle savait conter. Les années passant, il gagnera en souplesse et il s’en prendra à beaucoup de thèses toutes faites de ses amis d’extrême gauche. Comme d’autres, ces dernières années, il désespérera du Parti socialiste. Mais il saura surtout, avec l’âge, mieux dire la sagesse qui était en lui. Son envie de se lancer dans le roman le prouve, comme son regard sur Maurice Genevois, dont il était le gendre: un regard précis, mais plein de compréhension, de gentillesse.

Nous nous sommes croisés souvent, ici et là, dans des débats ou des rencontres journalistiques. J’ai une peine immense à avoir perdu un camarade fait de respect, d’érudition et de gentillesse. En l’assassinant, ses meurtriers voulaient tuer, précisément, le respect, l’érudition et la gentillesse.

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