Santé

Cigarette électronique et cancer: la vérité sur une fausse alerte japonaise

A Monaco, le 30 septembre 2014. REUTERS/Eric Gaillard.
A Monaco, le 30 septembre 2014. REUTERS/Eric Gaillard.

Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur AFP (via Les Echos)

E-cig = cancer. Telle a été la vague d'angoisse, amplifiée à l'envi, à laquelle on a assisté dans les médias, jeudi 27 novembre, après la publication d'une étude japonaise selon laquelle les vapeurs de cigarettes électroniques contiennent des substances cancérigènes, et ce «en quantités parfois bien supérieures à la fumée de tabac».

«Il ressort de ce document brut sans conclusion définitive que les vapeurs absorbées contiennent entre autres souvent du formaldéhyde, un composé aussi appelé formol considéré comme favorisant les cancers, de l’acroléine, du glyoxal (ou éthanedial) ou encore du méthylglyoxal et de l’acétaldéhyde (ou éthanal)», pouvait-on lire dans l'AFP. «Pour une des marques analysées, l’équipe de recherche a trouvé un niveau de formaldéhyde qui a atteint jusqu’à plus de dix fois celui contenu dans une cigarette traditionnelle», a expliqué à l'agence le chercheur Naoki Kunugita, qui a dirigé l’étude, devenue ensuite un rapport de l’Institut national japonais de la santé publique, remis au ministère japonais de la Santé. Remise opportune puisque ce gouvernement «se demande, à l’instar de ses homologues d’autres pays, dans quelle mesure il est nécessaire de réguler l’usage des cigarettes électroniques employant des liquides parfumés».

Parue fin octobre, l'étude a déjà fait l'objet de commentaires prudents de son auteur, notamment relayés par un spécialiste, le Dr Konstantinos Farsalinos, sur son site Ecigarette research. Nous avons pour notre part sollicité un spécialiste français, tabacologue et coordinateur de l'appel de 100 médecins en faveur de la cigarette électroniquele Dr Philippe Presles:

«Les taux de formaldéhyde trouvés dans la vapeur de treize modèles japonais d’e-cigarette publiés dans cette étude japonaise sont cinquante fois moins importants que ceux retrouvés dans la fumée du tabac. Certains journalistes ont repris un chiffre non publié à propos d’un modèle d’e-cigarette. L’auteur n’a pas eu le temps de vérifier et de chercher l’anomalie expliquant ce taux anormal.

 

RAS, donc, surtout quand on se rappelle que dans la vapeur de la e-cigarette, on ne retrouve ni hydrocarbures polycycliques, ni monoxyde de carbone, ni particule fine, les trois grands poisons du tabac. Rappelons enfin que le formaldéhyde n’est autre que le méthanal ou aldéhyde du méthane, le gaz naturel produit par tous les êtres vivants. Chez les plantes, le méthanal, très volatile, sert à transporter les arômes (thym, romarin, etc.).

 

Ce qui est inquiétant, c’est ce manque de recul des journalistes et cette mauvaise image de la e-cigarette résultant de toutes ces rumeurs.»

Le Dr Presles ajoute, pour ce qui est de la France:

«Pour la première fois depuis deux ans, les ventes de tabac sont reparties à la hausse. C’est un effet direct de l’annonce du Programme national de réduction du tabagisme. En effet, la seule mesure concrète de ce programme a consisté à interdire le e-cig dans de nombreux endroits, poussant les vapoteurs à rejoindre les fumeurs sur les trottoirs. Le résultat a été rapide.»

Nous sommes là, selon lui, face à un formidable paradoxe:

«On réclame des preuves de l’innocuité de la e-cigarette, alors qu’il faudrait des preuves de sa dangerosité: 0 mort, 0 malade depuis plusieurs années d’utilisation. Combien d’années faudra t-il encore perdre pour favoriser l’usage de ce dispositif qui n’est rien d’autre que le meilleur substitut nicotinique jamais conçu?»

Une première alerte similaire avait été lancée à grand renfort de publicité en août 2013 par 60 millions de consommateursCible de nombreuses critiques du fait de ses grosses failles méthodologiques, elle avait fait long feu mais causé néanmoins beaucoup de dégâts.

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