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Pour l'Allemagne, la France doit encore faire ses preuves

Manuel Valls revient de Berlin avec quelques assurances, mais Angela Merkel ne s'engagera qu'une fois que les réformes auront réellement été engagées.

Manuel Valls et Angela Merkel, le 22 septembre 2014 à Berlin. REUTERS/Fabrizio Bensch
Manuel Valls et Angela Merkel, le 22 septembre 2014 à Berlin. REUTERS/Fabrizio Bensch

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Manuel Valls est revenu de son voyage à Berlin sans défaite ni victoire.

L’axe franco-allemand –considérablement abîmé par les deux ans et demi de présidence Hollande, mais très miné déjà par les présidence Chirac et Sarkozy– ne se ressoudera pas sans de longs travaux pour que les deux pays se comprennent à nouveau.

Et rien n’est fait dans ce sens, au contraire, le Parti socialiste ne rate jamais une occasion pour s’en prendre à l’Allemagne, pour dénoncer son orthodoxie «de droite» (souvenez-vous de Montebourg), bref pour réclamer qu’elle paie.

Tous ces discours ne servent qu’à conforter les Allemands dans l'idée que les Français sont des latins, qu’ils sont devenus incapables de faire des efforts.

Le quotidien populaire Bild a traduit le sentiment de presque tous, outre-Rhin, en parlant non pas de la Frankreich, la France, mais de la Krankreich, krank voulant dire malade, le pays des malades.

«Chaos gouvernemental au pays des malades» | Bild le 25 août 2014

Comme, quand même, l’Allemagne conserve une sorte de timide respect pour la France et qu’elle est incapable de lui tourner franchement le dos, encore moins de la sermonner publiquement, Manuel Valls, de Berlin, n’est pas revenu bredouille. Pour résumer, il voulait trois choses des Allemands. Il en a obtenu une et demie.

Un, il voulait leur accord ou du moins leur neutralité pour que la France repousse une nouvelle fois son retour à 3% de déficit, cette fois à 2017.

Le Premier ministre a plaidé que couper encore dans les dépenses de l’Etat allait réduire encore la croissance et que ce n’était pas productif. Sur ce point, on peut penser qu’il a gagné. Rien n’est certain, mais Paris n'est pas seul dans ce combat contre Berlin, la France a l'Italie comme alliée et surtout les Etats-Unis et même le FMI. Donc, Manuel Valls pourra éviter l'austérité à la France. Merci pour Obama et Lagarde.

Deuxième demande: accorder un satisfecit pour les réformes.

Là-dessus, la réponse allemande est très ambiguë. Angela Merkel a jugé «impressionnant» le programme des réformes françaises, notamment le pacte de responsabilité. Mais elle n’a rien dit de précis et on peut comprendre sa réponse comme: oui, le programme est impressionnant… maintenant, mettez-le en œuvre. Le gouvernement est en somme poussé à accélérer vraiment les réformes, pas uniquement dans ses déclarations.

La troisième demande était que l’Allemagne relance. Qu’elle abandonne son acharnement à équilibrer ses comptes publics, que l’Etat se mette à investir dans de grandes infrastructures, les routes, les réseaux électriques, etc.

Là-dessus, échec total. Angela Merkel ne veut pas. L’Allemagne, un pays avec beaucoup de gens âgés, ne veut plus entendre parler de déficit et de dettes sur les épaules des générations futures. Paris aurait dû le comprendre et ne pas se faire d'illusions.

Plus largement, Manuel Valls s’est heurté à une sorte de mur, les Allemands ont désormais une colossale méfiance vis-à-vis de cette France incapable de se réformer. Pour convaincre Berlin, il faudra du temps, c’est-à-dire des preuves. Il faudra montrer que le programme «impressionnant» est bien mis en place, sans reculer.

Bref, l’Allemagne ne viendra pas au secours d’une France qui a trop tergiversé et reculé et qui doit d’abord faire ses preuves. Ensuite, une fois des vraies réformes engagées, alors l’axe franco-allemand pourra fonctionner à nouveau. Pas avant. C’est à Paris que Manuel Valls doit agir, pas à Berlin.

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