Temps de lecture: 2 minutes - Repéré sur BBC
Le 12 juillet dernier, dans la ville écossaise d’Inverness, un photographe local immortalisait l’intervention de trois policiers lors d’une altercation qui avait lieu à la sortie d’un McDonald's. Il ne se doutait pas que son cliché allait faire l’effet d’une bombe à retardement. Sur sa photo, les «bobbies» arborent en effet un accessoire inhabituel: outres leurs traditionnelles menottes, matraques et bombes lacrymogènes, un pistolet semi-automatique Glock 17 s’est ajouté à leur panoplie.
«C’est une vision qui aurait été impensable autrefois», explique la BBC. Plusieurs personnalités politiques britanniques ont réagi depuis à ce cliché, qui témoigne d’une mini-révolution en cours outre-Manche: peu à peu, des policiers britaniques commencent à porter des armes à feu pendant leur service.
Depuis sa création en 1829, la Met (Metropolitan Police), qui se voulait au départ une force de prévention des délits, fait figure d’exception dans le paysage policier mondial: les forces de l’ordre britanniques ne sont toujours pas autorisées à patrouiller avec une arme de poing (sauf en Irlande du Nord), même si elles ont considérablement étendu leurs pouvoirs.
Mais ce signe distinctif est en train de s’estomper. Cette tendance est particulièrement observable en Ecosse, où les policiers semblent de plus en plus équipés en armes à feu. Inverness n’est pas un cas isolé. La BBC recense d’autres cas similaires à Glasgow, Beauly, Brora – pourtant réputés pour être des endroits calmes – où des policiers ont été surpris l’arme à l’étui. Cependant, selon la BBC, seulement 275 policiers écossais (1,6% des effectifs) portent une arme en permanence lors de leurs rondes.
En comparaison, en Angleterre et au Pays de Galles, le nombre de policiers autorisés à avoir une arme à feu a diminué en 2012-2013 par rapport à 2011-2012, d’après les statistiques du Ministère de l’Intérieur, passant de 6.756 à 6.091, soit environ 5% de l'effectif total.
Le ministre de la Justice écossais Kenny MacAskill a défendu ce changement de politique auprès du parlement écossais. Mais selon la BBC «l’hostilité demeure forte du côté des députés, qui craignent que ce changement de tactique ne fasse qu’encourager les criminels à s’armer plus lourdement».
La grande majorité du corps des policiers reste également attachée à son non-armement. Selon un sondage datant de 2006, effectué auprès de 47.328 membres de la Fédération de Police, 82% d’entre eux sont contre le fait d’être systématiquement armés pendant leur service.
La société civile, elle, est divisée sur la question. Dans un sondage datant d’avril 2004, 47% des Britanniques se disaient en faveur de l’armement systématique de la police, tandis que 48% étaient contre.
Ce bouleversement des pratiques policières remettrait en cause selon la BBC le principe de «maintien de l’ordre par le consentement», selon lequel «les policiers rendent d’abord des comptes aux personnes qu’ils servent, plutôt qu’à l’Etat». Principe profondément enraciné dans la culture britannique.
D’après Richard Garside, directeur du Centre sur l’étude de la criminalité et de la Justice, interrogé par la BBC, l’opinion publique britannique est encore très attachée à l’idéal policier diffusé par la série Dixon of Dock Green (1955-1976), dans laquelle le héros, un sympathique Bobby nommé George Dixon, faisait régner l’ordre avec pédagogie et bon sens.