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Pourquoi l'excellente moyenne de buts va baisser, mais restera meilleure qu'aux dernières Coupes du monde

Sur les 16 rencontres de la première journée de matchs, 49 buts ont été marqués. Une exception par rapport aux précédentes éditions.

Le gardien de but de la Bosnie Asmir Bergovic encaisse un but de l'Argentin Lionel Messi au stade Maracana à Rio de Janeiro, le 15 juin 2014. REUTERS/Ricardo Moraes
Le gardien de but de la Bosnie Asmir Bergovic encaisse un but de l'Argentin Lionel Messi au stade Maracana à Rio de Janeiro, le 15 juin 2014. REUTERS/Ricardo Moraes

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Salvador, Brésil

Quelques jours avant de partir couvrir la Coupe du monde au Brésil, une inquiétude s'est emparée de moi, comme de nombreux observateurs et passionnés de football: et si ce Mondial, joué au pays du beau jeu et du foot offensif, accouchait d'un spectacle ennuyeux? Si la bonne humeur des spectateurs brésiliens et des touristes venus du monde entier restait cantonnée aux tribunes pendant que les meilleurs joueurs du monde s'affrontaient au cours de matchs insipides dominés par la défense et le cynisme?

Les dernières Coupes du monde n'incitaient pas à l'optimisme: depuis l'édition 1994 aux Etats-Unis, la moyenne de buts par match n'a cessé de diminuer, passant de 2,71 à 2,27 lors de la dernière édition en Afrique du Sud, la deuxième moyenne la plus basse de l'histoire après 1990. En comparaison, 2,45 buts ont été marqué en moyenne par match cette saison en Ligue 1, le plus fermé des cinq grands championnats européens, souvent moqué pour son caractère soporifique.

Jonathan Wilson, éminent spécialiste du football pour le Guardian, écrivait à quelques heures du coup d'envoi du match d'ouverture entre le Brésil et la Croatie:

«Quand un tournoi arrive, la prudence prend le contrôle. Les équipes les plus faibles essayent d'éviter l'humiliation et de sauver l'honneur par une défaite étriquée, tandis que le fait de savoir qu'un faux pas peut entraîner l'élimination rend les grosses équipes méfiantes.»

Mais l'inquiétude a été de courte durée. Sur les 16 rencontres de la première journée de matchs, qui s'est achevée ce mardi 17 juin avec Russie-Corée du Sud (et sans prendre en compte le résultat de Brésil-Mexique, qui fait déjà partie de la deuxième journée puisque c'est le deuxième match de ces équipes), 49 buts ont été marqués, soit une moyenne de 3,06 buts par match.

Les deux matchs auxquels j'ai eu la chance d'assister à Salvador ont accouché de dix buts, avec d'abord l'énorme surprise d'Espagne-Pays-Bas (1-5) puis la démonstration de l'Allemagne face au Portugal (4-0). La moyenne de cette année est pour l'instant la plus élevée depuis la Coupe du monde 1958, une époque où les gardiens de but n'avaient pas de gants.

Bien sûr, le nombre de buts n'est pas toujours un indicateur fiable de la qualité ou de l'intérêt d'une rencontre. Mais, même les plus puristes des passionnés de foot préfèrent au fond d'eux-mêmes voir une Coupe du monde où les filets tremblent plus souvent. Et se posent tous la question: cela va-t-il durer?

Sans doute pas. Les buts sont une statistique comme une autre: plus l'échantillon est grand, plus la moyenne se rapprochera de celle que l'on observe dans tous les championnats de haut niveau du monde, qui oscille entre un peu plus de 2 et un peu moins de 3 buts par match (le dernier championnat allemand fait figure d'exception: il a dépassé la barre des 3 buts par match pour le première fois depuis 20 ans).

La moyenne de buts de la première journée de Coupe du monde donne peu d'indication sur la moyenne finale. En 2002, presque trois buts par match avaient été inscrits lors de la première journée, grâce entre autres au 8-0 infligé par l'Allemagne à l'Arabie saoudite, avant que la moyenne ne plonge au final à 2,52, la quatrième la plus faible de l'histoire. 

En revanche, on peut voir sur le tableau ci-contre que, depuis 1986, première année où le Mondial s'est joué dans un format avec une seule phase de poule (24 équipes de 1986 à 1994 puis 32 équipes à partir de 1998) puis des huitièmes de finale, quarts de finales, etc., jamais aucune journée n'a eu une moyenne de buts plus élevée que celle dont vient d'accoucher la première journée de 2014.

La première journée est aussi généralement celle où l'on marque le moins depuis 1986 (quatre fois sur sept compétitions) et jamais celle où on marque le plus. Cette impression de subir tous les quatre ans d'insipides matchs de début de tournoi qui découragent d'emblée les non-initiés ayant décidé, pour une fois, de donner sa chance à cette compétition dont tout le monde parle, n'est finalement pas infondée. 

 

Le dernier Mondial en Afrique du Sud a été un exemple particulièrement frappant de ce phénomène, avec lors de la première journée une moyenne soporifique de 1,6 but par match à faire passer les matchs de Ligue 1 pour des festivals de buts.

Bilan: six victoires sur le score de 1-0 et deux 0-0, dont un France-Uruguay qui n'est pas resté dans l'histoire de la compétition.

De ce point de vue-là, 2014 est donc bien une exception remarquable, avec un seul 0-0 (Iran-Nigéria) et un seul 1-0 (Mexique-Cameroun) au cours de la première journée.

Que nous réserve la suite de la compétition en termes de buts? Deux choses sont à peu près certaines. 

D'abord, cette moyenne ne se maintiendra pas. Elle vient déjà de tomber en dessous de 3 buts par match (2,88 exactement) avec le début de la deuxième journée et le 0-0 du Brésil face au Mexique, et devrait finir à un niveau encore inférieur.

Ensuite, le fait que la première journée soit généralement la moins prolifique et que la différence avec les moyennes habituelles soit si grande cette année garantit de manière quasi-certaine que le déclin observé depuis 1994 va prendre fin et que la moyenne de buts par match de la Coupe du monde 2014 dépassera celles des éditions 2006 et 2010.

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