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L'Allemagne aussi trouve qu'elle a trop de régions

Depuis longtemps, notre voisin ambitionne de réduire le nombre de ses Länder. Sans y parvenir.

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Sous le nom de «fusion des Länder», les Allemands discutent, depuis la création de la République fédérale en 1949, de la réforme territoriale. Sans résultat.

Dans la Loi fondamentale qui leur servait de Constitution, il y avait un article affirmant que l’Etat «doit être remembré». Prudents, ils ont changé l’expression « doit être » par «peut être». Car de la réduction du nombre des Länder –les Etats fédérés–, qui sont seize depuis la réunification de 1990, il est souvent question sans qu’il soit possible de passer à l’acte.

Les résistances locales sont trop fortes. Le seul regroupement qui ait eu lieu date de 1952: le Land de Bade-Wurtemberg, dont la capitale est Stuttgart, avait alors été créé par la fusion du pays de Bade, du Wurtemberg-Bade et du Wurtemberg-Hohenzollern.

La situation historique est pourtant différente par rapport à la France. L’Allemagne est, comme disait Helmuth Plessner, historien de l’entre-deux guerres, une «nation tard venue» qui n’a été unifiée qu’en 1871. Jusqu’alors elle était une collection de royaumes, de principautés, de duchés, de villes-libres, etc. Après la Deuxième guerre mondiale, les Länder, à l’Ouest comme à l’Est, ont épousé plus ou moins les frontières anciennes et les zones d’occupation des quatre puissances victorieuses du Reich (Etats-Unis, Grande-Bretagne et France à l‘Ouest, Union soviétique à l’Est).

Tout le monde est d’accord sur un constat: seize Länder, avec leur gouvernement, leur parlement, leur administration, etc., c’est trop. Wolfgang Clement, ancien ministre social-démocrate de l’Économie, estimait, au début des années 2000, que le nombre idéal serait cinq ou six.

Tout le monde

est d'accord:

16 Länder, c'est trop

D’autant que les disparités démographiques et économiques sont fortes. L’Etat de Brême, avec la ville du même nom et le port de Bremerhaven, n’a que 660.000 habitants contre 17 millions en Rhénanie du Nord-Westphalie, la région dont la capitale est Düsseldorf, qui a un PIB vingt fois supérieur à celui de Brême.

Même disparité pour la richesse par habitant. Un citoyen de la ville Etat de Hambourg est en moyenne deux fois plus riche qu’un ressortissant du Mecklembourg-Poméranie occidentale, dans l’ancienne RDA.

Plusieurs tentatives de fusion ont été faites, mais ont toujours échoué. En 1996, Berlin et le Land de Brandebourg, qui entoure la capitale, avaient décidé de se rapprocher. Lors du référendum –obligatoire selon la Constitution fédérale–, les Berlinois ont voté oui, les habitants du Brandebourg non. La fusion n’a pas eu lieu.

Dix ans plus tard, le projet d’une fusion entre la Saxe, la Saxe-Anhalt et la Thuringe a été lancé mais est resté dans les cartons. L’opposition l’a emporté en arguant qu’en fusionnant trois Länder pauvres, on ne faisait pas un Land riche.

Les discussions sur la création d’un «Etat du Nord» à partir de Hambourg et du Schleswig-Holstein, avec éventuellement le Mecklembourg ou encore la façade maritime de la Basse-Saxe, sont permanentes mais ne se concrétisent pas, de même que l’idée de fusionner la Sarre et la Rhénanie-Palatinat. L’imagination n’a pas de limite mais la politique ne suit pas.

L’aspect financier n’est évidemment pas absent de toutes ces réflexions. L’Allemagne a un système de péréquation entre le Etats fédérés riches et pauvres qui est sans cesse remis en question. Pour ne prendre qu’un exemple, les riches Bavarois sont de moins en moins disposés à payer pour les Länder déficitaires, comme la ville Etat de Brême ou les Länder de l’Est. Les économies qui pourraient être réalisées grâce à une rationalisation du découpage sont un véritable serpent de mer. Les estimations vont de quelques dizaines de millions à plusieurs milliards. Les experts ne sont pas d’accord.

Une occasion de revoir tout le système se présentera en 2020. La «surtaxe de solidarité» acquittée par les contribuables de l’Ouest pour subventionner les Länder de l’Est devrait être alors supprimée. Une refonte du financement des Länder pourrait pousser au changement et bousculer les partisans du statu quo.

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