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Marseille: quand la croisière se grippe

La dernière histoire marseillaise...

Temps de lecture: 3 minutes

Le cadre. Nous sommes à Marseille, entre le 31 juillet et le 1er août 2009, et voici qu'apparaît le A(H1N1). Ainsi donc les trois unités de la tragédie méditerranéenne. Imaginons le décor; somptueux. Vous êtes à bord de l'un de ces paquebots que l'on dit de rêve parce qu'ils vous emmènent pour des croisières également qualifiées. Ici c'est le «Voyager of the seas»;  1 500 hommes d'équipage pour 3.600 passagers, hommes et femmes.  Propriété de la Royal Caribbean le paquebot effectue une boucle dont on peut raisonnablement rêver: Barcelone, Naples et Marseille avant de regagner la capitale catalane. A la veille de l'escale phocéenne une halte touristique, digestive (œnologique peut-être?)  à Villefranche-sur-Mer (Alpes-Maritimes),.

Acte I. Las, l'aurorité préfectorale apprend alors que le A(H1N1)  a embarqué, virus clandestin, dans les soutes. Il est déjà sur les coursives, a déjà peut-être gagné les salles de jeu et les bars, infecté les bains à remous collectifs, les salles de bains, celles de danse.... Quatre mois après l'émergence de cet agent pathogène au Mexique les choses ne traînent plus guère sur le sol français. Vendredi 31 juillet: on vient de découvrir quatre cas parmi les 3.600 passagers de ce paquebot qui doit accoster à Marseille le lendemain matin, quatre cas bien plus graves qu'une soixantaine de membres de l'équipage eux aussi atteints mais dans les soutes et les caves.  

Acte II. Alerte blanche: la préfecture suspend immédiatement, comme elle en a le droit républicain et le devoir sanitaire, le débarquement. Communiqué diffusé vers 20H30, le 31 juillet, par la préfecture des Bouches-du-Rhône: «Une surveillance médicale exercée à bord a  permis de détecter quatre passagers atteints (...)  parmi les 3.600 que compte le navire (...) Par conséquent, le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé, après avoir pris  contact avec la cellule d'urgence sanitaire conjointe du ministère de  l'Intérieur et celui de la Santé, de suspendre le débarquement des membres de l'équipage et des passagers lors de leur escale à Marseille demain» affirme le communiqué.

La préfecture phocéenne ajoute (avec l'accent ou pas): «une enquête épidémiologique sera menée à l'arrivée du bateau par  des médecins qui monteront à bord afin de rencontrer l'équipe médicale et les  personnes atteintes. A la suite des résultats de cette enquête, une décision pourra alors être prise sur l'autorisation de débarquement de passagers». Outre la soixantaine de membres d'équipage atteints, quelque 70 autres  présentent déjà des signes de la maladie précisait alors  la préfecture des  Alpes-Maritimes. Au nom du principe de précaution et de la santé publique il importe de préciser que durant l'escale de Villefranche-sur-Mer, les hommes d'équipage infectés étaient restés à l'isolement sur le navire tandis que les autres aveint été privés de permission de sortie. Pourquoi? La préfecture des Bouches-du-Rhône avait opté pour la même solution avant, nous dit un confrère de l'Agence France Presse, «de se raviser au vu des quatre premiers cas décelés parmi les passagers». On commence à murmurer (car que faire en un paquebot sinon participer aux murmures?) que les premiers cas infectieux avaient été diagnostiqués avant le départ de la croisière et «immédiatement isolés». La belle affaire...

«Une seule personne a été confirmée A(H1N1), le premier jour de la croisière à Barcelone. Les  tests ont été effectués dans un laboratoire de Madrid. Elle a été immédiatement mise à l'isolement et traitée au Tamiflu et elle est aujourd'hui guérie, confiera bientôt à l'Agence France Presse Philippe Ramon, sous-préfet des Bouches-du-Rhône.» La nationalité de cette personne (travailleur/voyageur ?) n'a pas été précisée.

Acte III.  Face à Marseille les 62 membres de l'équipe qui avaient présenté des symptômes et une soixante de personnes ayant été en contact avec elles (comment fait-on pour les identifier?) «restent à l'isolement, tout comme 5 passagers et une quinzaine de passagers ayant été en contact avec elles» (même question). Puis, en cette belle aube du 1er août 2009 une dizaine de personnes (du Samu 13, de la Direction départementale de l'action sanitaire et sociale, de la Ville, de l'état-major de zone sud  et de la Police aux frontières) montent à bord du paquebot de  la compagnie Royal Caribbean, immatriculé à Nassau (Bahamas).

Peu de temps après le sous-préfet des Bouches-du-Rhône et l'équipe médicale chargée de conduire une enquête épidémiologique quittent le paquebot: ils affirment avoir pu a pu constater «la très grande qualité de la prise en charge des personnes qui présentaient des symptômes. Elles ont été mises à l'isolement avec filtration d'air et placées sous Tamiflu». «L'équipe médicale et sanitaire a considéré qu'il y avait un risque extrêmement marginal, et que par conséquent nous étions tout à fait en capacité d'autoriser le débarquement», ajoute la préfectorale méditerranéenne. On espère pour elle qu'elle ne se trompe pas. La ville de Marseille vit avant tout parce qu'elle est un port. Marseille introduisit il y a plusieurs siècles la peste dans le royaume de France. A suivre...

Jean-Yves Nau

Image de Une: Le Voyager of the Seas   Reuters

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