France

La catastrophe de Brétigny-sur-Orge a eu lieu sur un réseau à risque

La catastrophe du Paris-Limoges s’est produite en gare de Brétigny-sur-Orge sur une voie du réseau du RER C. Sur des réseaux proches de la saturation, les sollicitations sont extrêmes et les problèmes sont démultipliés.

Image postée sur le compte Twitter officiel de la SNCF.
Image postée sur le compte Twitter officiel de la SNCF.

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Quelles que soient les conclusions de l’enquête qui sera diligentée pour établir les causes de l’accident du train Intercités Paris-Limoges, en gare de Brétigny sur Orge ce vendredi, des responsabilités vont être inexorablement pointées. Avec d’autant plus de vigueur que les problèmes dans les transports ferroviaires en Ile-de-France sont sans cesse dénoncés, sans que les utilisateurs du train ne perçoivent d’amélioration.

Car le réseau, vieillissant, est mis de plus en plus à contribution. Certes, il est modernisé mais n’avait pas été conçu pour supporter le trafic qu’il connait aujourd’hui. Ce qui génère des situations à risque.

En l’occurrence, les trains Intercités et le RER C partagent le même réseau. Or, qu’il s’agisse du réseau Paris Nord de la SNCF qui comprend le RER A —et est l’un des plus fréquentés d’Europe—, du RER B (exploité par la RATP) lui-aussi en bute à de nombreux arrêts dus à la saturation, ou du RER C sur laquelle circule plus de 500 trains par jour,  les dysfonctionnements se multiplient.

«Victime de son succès, le réseau ferroviaire régional est utilisé aux limites de sa capacité», constatait le Syndicat des transports en Ile de France (Stif) en mars dernier, rappelant que la mise en place du réseau RER remonte à 1960.

Pour faire circuler de plus en plus de trains non seulement intra-régionaux mais également des trains classiques interrégionaux comme l’Intercités Paris-Limoges, les opérateurs multiplient les équipements automatiques de sécurité. Mais même avec des technologies de pointe, des flux des trains de plus en plus denses imposant une gestion de plus en plus tendue du réseau induisent une augmentation des risques de défaillance, non seulement des équipements en question mais aussi de l’infrastructure de plus en plus sollicitée. 

La solution pour décongestionner les voies existantes consisterait à en créer de nouvelles. Mais dans un environnement aussi urbanisé que l’Ile-de-France, il est extrêmement compliqué et surtout financièrement très lourd de créer de nouvelles voies de circulation. En l’occurrence, les autorités préfèrent, depuis des décennies (comme pour la création d’une nouvelle ligne sur Roissy), botter en touche et renvoyer à d’interminables études. Ainsi, au nord comme au sud de la capitale, les réseaux sont-ils saturés.

Par ailleurs, ce tragique accident fait résonner le débat engagé depuis plusieurs années sur la maintenance dans le chemin de fer français. Le Sénat a relayé la Cour des Comptes qui, en 2012, a tiré la sonnette d’alarme sur les conditions d’entretien du réseau ferroviaire national. La Cour a notamment soulignant les problèmes de gouvernance entre Réseau ferré de France (RFF), le gestionnaire du réseau, et l’exploitant SNCF, qualifiant leur articulation de «laborieuse» avec les conséquences que l’on imagine sur les programmes d’entretien à établir collectivement.

Une réforme a d’ailleurs été engagée pour créer un «pôle public ferroviaire renforcé» sous la houlette de la SNCF qui militait en ce sens. Mais en attendant, le retard constaté par les Sages dans la maintenance du réseau n’a pas été comblé.

Comme d’habitude dans le cas d’une catastrophe, qu’elle soit ferroviaire ou autre, c’est une convergence d’éléments qui aboutit à une situation dramatique.

Ce n’est pas parce que le train Paris-Limoges circule sur une voie du RER C qu’il s’est coupé en deux, que six voitures ont déraillé, que quatre se sont couchées dont deux ayant même été broyées et déchiquetées. Mais la difficulté d’exploitation sur un réseau saturé constitue un facteur aggravant.

Ce n’est pas non plus parce que la stratégie du ferroviaire en France a été de se concentrer sur le TGV depuis trente ans qu’un tel accident a eu lieu en banlieue parisienne avec un train Corail traditionnel. Mais des retards ont été pris dans l’amélioration de la circulation des trains en Ile-de-France, comme les nombreuses plaintes de passagers l’attestent.

Et ce n’est pas parce que les énergies des politiques et des opérateurs se sont dispersées dans des débats sans fin que le train parti de la gare d’Austerlitz s’est coupé en deux à Brétigny vers 17h. Mais s’ils prenaient des décisions qui s’imposent pour anticiper et prévenir les situations à risque plutôt que de les gérer dans l’urgence, la probabilité que survienne de telles situations serait moins grande.

Gilles Bridier

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