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Fausse victoire pour Berlusconi

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«Stop à Berlusconi» titrent aujourd'hui les principaux journaux italiens. Avec 35% des suffrages, le chef de gouvernement est bien loin de l'objectif qu’il s'était fixé: 43-45 %. Il y a quelques mois, juste après la fondation de son nouveau parti (Il popolo della libertà, le peuple de la liberté) issu de la fusion de Forza Italia et Alleanza nazionale (le parti des anciens fascistes), Berlusconi avait demandé aux Italiens d'atteindre 50 % sans les voix de la Ligue du Nord. Pari perdu. La Ligue (son allié au gouvernement) fait un score important (presque 10% dans toute l’Italie, mais 20% dans tout le nord) et se renforce face au président du Conseil.

Le parti démocrate (centre gauche) recule (de 33 à 26) mais beaucoup moins par rapport aux prévisions. Le véritable vainqueur à gauche est l'ancien juge du parquet de Milan Antonio Di Pietro qui obtient 8 % alors qu'il n'avait que 3-4%.

Donc seulement un an après son retour au gouvernement, Berlusconi n'arrive pas à faire sauter la banque. Bien sûr, il est aux affaires, son gouvernement est solide et le centre gauche est toujours en difficulté. Mais les objectifs de ce tycoon converti à la politique enregistrent un arrêt parce que sa philosophie politique n'accepte pas les pauses: c'est un surenchère permanente. Surtout après une campagne surréaliste qui s'est articulée autour de thèmes indifférents à la politique, mais arcboutés aux frasques de Silvio Berlusconi.

D'abord sa femme, Veronica Lario, a demandé le divorce. «Il est malade», a-t-elle déclaré en dénonçant l’attitude de son mari à l'égard des jeunes femmes, parfois très jeunes... Madame a aussi déploré le «ciarpame» (le bric-à-brac) politique des choix de son époux dans la composition des listes européennes: plusieurs «veline» (les filles qui font le spectacle dans les télévisions de Berlusconi) et si peu de personnages compétents.

Cette guerre familiale a donné le ton de la campagne et pas seulement à droite. S’y sont ajoutés le «scandale Noemi», cette jeune fille de la banlieue napolitaine avec laquelle Berlusconi entretient un mystérieux rapport qui touche même aux parents, et peu après celui des photos prises à villa Certosa, la principale résidence sarde du président du Conseil.

Berlusconi a réagi selon son habitude: occupation militaire des écrans télévisés pour accuser la gauche et ses ennemis de se servir du «gossip» pour faire la campagne électorale. Et bien sûr, il a demandé à ses supporters de riposter massivement contre la gauche en votant en sa faveur.

Le résultat est là. «Ce n'est pas bon», a réagi à chaud le président du Conseil.

Dans l'immédiat rien ne va changer. Mais c'est un coup d'arrêt dans la percée de Silvio Berlusconi dans la vie politique italienne. Le vote de dimanche démontre que la conquête totale de l’Italie dont il rêvait n'est pas encore faite.

Du côté de la gauche cependant, il n’y a pas lieu de se réjouir du résultat non plus. Mais si on le rapproche des prévisions qui plaçaient le parti démocrate à 20 % des intentions de vote tandis que certains prévoyaient même sa disparition – et pas seulement dans le camp de la droite berlusconienne, ce scrutin est tout de même le signal d’un changement.

Les thèmes qui sont restés totalement étrangers à la campagne, à savoir les questions européennes et la crise économique, seront pourtant les véritables préoccupations du gouvernement dans les prochains mois. Berlusconi n’aura pas d’excuse pour reporter encore la recherche des solutions que tout le pays attend; pas plus que le parti démocrate qui devra également descendre dans l’arène pour défier enfin le gouvernement et son chef sur le terrain de la réalité.

Cesare Martinetti

Photo: Silvio Berlusconi à la mi temps d'un match de football du Milan AC   Reuters

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